Entretien avec le directeur des opérations et de l’emploi de la gendarmerie

  • Par la capitaine Céline Morin
  • Publié le 30 janvier 2016

Le général de corps d’armée Michel Pattin revient sur le pilotage opérationnel de la DGGN, notamment à travers la mise en œuvre du centre des opérations en période de crise.

Mon général, quel est votre rôle, en tant que DOE, dans le cadre de cet état-major opérationnel ?

En qualité de DOE, ma mission est de proposer au D.G. des solutions en cas de crise. J’ai sous mes ordres toutes les sous-directions opérationnelles, avec leurs différents experts et spécialistes, ce qui me donne une vision assez large de nos capacités, ainsi que la connaissance de la disponibilité et de la position des unités. La DOE, au regard de l’événement, désigne le responsable Territorialement compétent (T.C.) le mieux positionné pour la prise en compte de la manœuvre. Parallèlement, notre mission est de soulager le terrain de certaines tâches.

En règle générale, nous rédigeons le projet d’ordre d’opérations pour le responsable T.C. De même, dans une démarche proactive, nous anticipons les besoins du terrain en termes d’effectifs et de technicités, et projetons des forces d’initiative, en fonction de l’ampleur et de la particularité de la crise. Lors du crash de la Germanwings, nous avons ainsi envoyé l’IRCGN et l’UGIVC. C’est l’intérêt du pilotage au niveau de la DGGN. Au regard des crises auxquelles nous avons dû faire face en 2015, la mécanique est désormais bien huilée.

Comment la DGGN se met-elle en ordre de bataille lors du déclenchement d’une crise ?

L’information nous arrive généralement par le quart opérationnel du Crogend. Toutefois, il peut y avoir dans le même temps ou un peu en amont, un compte rendu oral de l’échelon territorial de commandement, comme pour la Germanwings, où j’ai été alerté de la disparition de l’avion par le commandant de région zonale. Dans la foulée, j’ai rendu compte au DGGN.

Dès la confirmation de la découverte de débris, nous avons immédiatement mesuré l’ampleur de la crise à venir, la particularité de l’opération et son fort retentissement médiatique.

Le dispositif est très vite monté en puissance. Au niveau de la DGGN, et de la DOE en particulier, cela s’est concrétisé par la mise en œuvre du centre des opérations dans les salles jouxtant le Crogend, qui lui continuait de gérer le quotidien.

Notre dispositif de crise repose sur la SDDOPP (Sous-direction de la défense, de l’ordre public et de la protection), qui arme le centre des opérations avec les personnels du Centre de planification et de gestion de crise (CPGC), renforcés par les effectifs des autres sous-directions de la DOE impactées par l’événement (sous-direction de la police judiciaire, sous-direction de la sécurité publique et de la sécurité routière, sous-direction de l’anticipation opérationnelle, etc.).

Personne n’est exclu du dispositif, mais personne n’y est non plus d’office. Il y a autant d’experts que de besoin. De sept personnels au minimum, on peut ainsi rapidement monter à une quinzaine.

Outre la salle de suivi des opérations, se mettent également en place la salle de planification et la salle de décision, où se retrouvent le DOE ou son représentant et les différents responsables. Le centre des opérations est un outil dans la main du DOE, au service du D.G. C’est lui qui, au contact des plus hautes autorités de l’État, doit être en capacité d’apporter la réponse de la gendarmerie.

Il faut donc qu’il soit en mesure de faire un point de situation précis de l’engagement et du positionnement de nos unités, mais aussi de nos possibilités d’action. La mission des officiers chargés de la planification est justement de prendre du recul sur les événements de manière à anticiper les différentes hypothèses et à proposer différents modes d’action.

Leurs propositions sont étudiées en salle de décision avant d’être communiquées au D.G. Lors d’une crise, il nous appartient aussi d’armer H24 la Cellule interministérielle de crise (CIC) à Beauvau, à hauteur de quatre personnels si la gendarmerie est concourante, jusqu’à une dizaine si elle est menante. Aussi, quand nous faisons face à des situations amenées à durer, les effectifs de la DOE sont mis à rude contribution.

C’est pour cette raison que depuis l’été dernier, les autres directions de la DGGN peuvent renforcer les effectifs de la DOE, au sein de la CIC et du centre des opérations, comme en novembre et en décembre derniers. Nous avons aussi été renforcés pendant un mois par des officiers de l’école de guerre, ce qui nous a notamment permis de créer une cellule spécifique de suivi des perquisitions administratives et des assignations à résidence.

Sur quels outils vous appuyez-vous pour conseiller le D.G. et faire remonter l’information jusqu’aux autorités ?

Tout d’abord, nous nous appuyons sur la remontée des informations qui convergent vers le Crogend par les canaux traditionnels. Nous avons aussi développé l’utilisation de la troisième dimension et le déport d’images. Les images prises par les caméras installées sur nos hélicoptères peuvent être déportées et retransmises en direct dans les différents P.C. jusqu’à la CIC, voire la salle de décision ministérielle (« le fumoir »). C’est une des prouesses de nos spécialistes.

C’est ainsi que le ministre de l’Intérieur a pu assister en direct à l’opération d’évacuation du site de Sivens depuis Beauvau. Au même endroit, le Premier ministre a pu voir en direct le travail des gendarmes sur le site du crash de la Germanwings et, ainsi, mesurer toute la difficulté de l’opération. À cela s’ajoute l’outil cartographique.

Désormais, pour chaque événement, il y a systématiquement une cartographie présentant de façon simple et concrète la situation sur le terrain, avec le positionnement précis des forces amies, des adversaires, la délimitation de la zone d’activité, la mission de chaque force mais aussi l’évolution de la manœuvre. Plus parlant qu’une fiche, cet outil permet au D.G. de matérialiser l’engagement de la gendarmerie sur le terrain et, potentiellement, d’expliquer la manœuvre aux différentes autorités.

Je pense aussi que la tablette Neogend permettra aux personnels sur le terrain d’être mieux au courant de la situation. Notamment parce qu’on pourra plus facilement leur diffuser des messages, leur envoyer des documents étoffés, ainsi que des cartes. Eux-mêmes pourront nous transmettre des photos. Cela renforcera les échanges. Tous ces outils nous permettent de mieux matérialiser la situation, et donc de piloter la manœuvre avec encore davantage d’efficacité.

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