Gendarmerie mobile : une constante adaptation

  • Par le commandant Céline Morin
  • Publié le 16 avril 2019
© MAJ F. Balsamo

Le colonel Christophe Herrmann, sous-directeur de la défense de l’ordre public et de la protection, revient sur l’engagement hors norme de la gendarmerie mobile ces derniers mois. À cette occasion, il souligne l’importance de la formation dispensée aux unités de gendarmerie mobile, leur permettant de faire face à l’évolution de la menace et des adversaires.

Quelle est aujourd’hui la physionomie de la Gendarmerie mobile (G.M.) ?

La G.M. représente aujourd’hui un volume de 12 600 militaires, répartis dans 109 escadrons implantés sur l’ensemble du territoire. Elle reste une subdivision d’arme majoritairement composée de jeunes gendarmes, généralement en sortie d’école, bénéficiant d’un encadrement expérimenté. Depuis 2015, date de l’ouverture de la mobile aux sous-officiers féminins, la féminisation s’est poursuivie. Aujourd’hui, nous comptons 290 officiers et sous-officiers féminins, répartis au sein de 37 unités. Le métier du Maintien de l’ordre (M.O.) attire de nombreuses femmes en sortie d’école. Le processus d’affectation est le même pour tous, au choix et selon le classement. Il en va de même pour les missions sur le terrain : il n’y a aucune distinction.

Comment les missions de la G.M. ont-elles évolué ces dernières années ?

Le rythme d’emploi de la G.M. est très élevé et le contexte social actuel ne laisse pas augurer d’une baisse à court/moyen terme. Actuellement, la moyenne annuelle est de 199 jours d’emploi par militaire, dont 156 hors résidence. Nos unités sont engagées aussi bien en métropole, qu’en outre-mer et en opérations extérieures. Le volume des missions permanentes est significatif. Elles occupent en effet 40 escadrons, dont 21 projetés outre-mer et un autre servant en opérations extérieures (Irak, Libye et Frontex). Nous avons d’ailleurs récemment projeté un peloton d’intervention au Vénézuela pour assurer la sécurisation des emprises diplomatiques. La fréquence de ces projections, de trois mois consécutifs sans relève, s’est d’ailleurs intensifiée, revenant tous les treize mois et demi pour chaque unité. Ce sont des missions au cours desquelles les gendarmes peuvent être confrontés à des situations difficiles, demandant une réelle robustesse, comme dans la jungle guyanaise dans le cadre de la lutte contre l’orpaillage, ou à Saint-Martin, après le passage de l’ouragan Irma en 2017.

Les missions permanentes comprennent également les emplois sur la plaque parisienne (Palais de justice, ambassades), la Lutte contre l’immigration irrégulière (LIR), qui a pris une importance marquée, les projets d’aménagement contestés, sur lesquels sont mobilisées quelques unités, et les missions traditionnelles de protection de l’Île Longue et d’escorte de convois sensibles.

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S’ajoute à cela l’actualité. L’année passée a été marquée par des engagements forts, comme l’évacuation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, l’intervention sur celle de Kolbsheim, l’itinérance mémorielle du président de la République, la sécurisation avec succès du référendum en Nouvelle-Calédonie et, depuis le 17 novembre, les actions successives des « gilets jaunes », sans oublier la sécurisation des fêtes de fin d’année, sous tension après l’attentat perpétré à Strasbourg. Tout cela contribue à un engagement tout à fait exceptionnel de la G.M. Pour mémoire, à deux reprises ces derniers mois, nous avons engagé 106 escadrons sur 109, soit quasiment 98 % de l’effectif.

Cette actualité exigeante a, de fait, recentré la G.M. sur son cœur de métier. Nous avons dû limiter notre renfort à la gendarmerie départementale, pour ne conserver que les missions de LIR et un renfort de trois escadrons, au lieu de six en temps normal, au dispositif hivernal de protection des populations.

Outre ce rythme d’activité soutenu, on assiste également à une recrudescence de la violence. Comment la G.M. y fait-elle face ?

Il est vrai que l’on constate un recours accru, et de plus en plus systématique, à la violence, de la part d’une frange radicale d’opposants, souvent issus de mouvances « ultras », qui s’infiltrent dans les manifestations organisées, ou profitent de toute opportunité pour provoquer des troubles et chercher à atteindre les forces de l’ordre. Ce sont des individus souvent bien équipés, très organisés, munis d’armes par destination.

Ces violences ne sont toutefois pas nouvelles. Nous y avons été confrontés à maintes reprises, à Persan-Beaumont, mais aussi à Bure, à Notre-Dame-des-Landes, à Kolbsheim… Ce sont des phénomènes auxquels la G.M. a l’habitude de faire face. Nos escadrons sont parfaitement formés et équipés pour répondre à toutes les situations d’ordre public, du service d’ordre en passant par le M.O., jusqu’au rétablissement de l’ordre en situation insurrectionnelle ou dans des conditions dégradées, avec l’appui de matériels spécifiques, comme notre capacité blindée, et d’unités spécialisées.

Notre dispositif de M.O. est structuré pour répondre à ces différents enjeux et à leur évolution. Nous nous appuyons sur quatre principes d’action essentiels, réaffirmés début 2018 lors de la révision de notre doctrine d’emploi et dans tous nos schémas d’engagement : le primat de l’autorité civile, la gradation de l’emploi de la force, le maintien à distance et, surtout, des unités spécifiquement formées, auxquelles s’ajoutent des capacités en termes de planification et de conception de manœuvre.

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La clé de voûte du M.O. est l’emploi d’unités professionnelles, c’est-à-dire les escadrons. Bien entendu, dans le cadre de l’urgence, ou pour des missions statiques de défense ferme, les pelotons de surveillance et d’intervention gendarmerie peuvent être engagés. Mais ce n’est pas leur cœur de métier. En gendarmerie, tout officier ou sous-officier, quelle que soit sa subdivision d’arme à terme, passe par le Centre national d’entraînement des forces de gendarmerie (CNEFG) de Saint-Astier dans le cadre de sa formation initiale, où il est sensibilisé aux problématiques d’ordre public. C’est une plus-value indéniable, mais cela n’en fera pas un spécialiste. Le M.O. ne s’improvise pas. C’est une question d’entraînement, un savoir-faire collectif, mais aussi un état d’esprit qui permet d’être en capacité de gérer une foule parfois très violente, de maîtriser la force employée…

L’une des forces de la G.M., c’est la formation d’excellence, qu’elle soit initiale ou en recyclage, dispensée par le CNEFG. Nourri par les retours d’expérience des unités, cet enseignement tient compte en permanence de l’adversaire et de ses moyens d’action. Les exercices évoluent sans cesse et nous permettent de travailler nos techniques, d’adapter nos tactiques à la menace pour y faire face dans les meilleures conditions. La physionomie de la mobile, mêlant jeunesse, dynamisme et encadrement solide, est également un atout.

Les retours du terrain nous permettent également de dégager différentes priorités en termes de protection, d’équipements, de transmission, nécessaires pour faire face aux enjeux et à la violence auxquels sont confrontées les unités. Par exemple, en termes d’équipements, nous souhaitons accroître la dotation en armes de force intermédiaire, comme les diffuseurs lacrymogènes de grande capacité, ou encore doter les unités de protection spécifique en matière de jets d’acide. Concernant les modes d’action, l’utilisation des drones est étendue afin de faciliter la manœuvre. L’emploi des chiens est également une piste évoquée. Là encore, toutes les expérimentations techniques et opérationnelles se font en lien étroit avec Saint-Astier.

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