Être gendarme mobile : une vie au service de la France

  • Par Mme Elsa Vives Servera
  • Publié le 16 janvier 2019
© MAJ F. Balsamo

Les manifestations des gilets jaunes, qui ont commencé le 17 novembre dernier, ont entraîné un dispositif des forces de l’ordre sans précédent. La quasi-totalité des effectifs de gendarmerie mobile a été engagée chaque week-end. Mais qui sont ces hommes et ces femmes qui protègent les Français ? Nous les avons rencontrés.

À chaque manifestation des « gilets jaunes », chaque samedi, la violence semble monter d’un cran envers les forces de l’ordre. Le 5 janvier n’a pas échappé à la règle. Sur la passerelle Léopol-Sédar-Senghor, dans le 1er arrondissement de Paris, un homme est filmé en train de descendre une rambarde. Il s’en prend alors violemment à deux gendarmes mobiles qu’il frappe à plusieurs reprises. Cet homme, c’est Christophe Dettinger, champion de France de boxe en poids lourds légers en 2007 et 2008. Les deux gendarmes mobiles sont blessés : le premier se voit prescrire quinze jours d’incapacité totale de travail, le second deux jours.

L’agresseur est placé en détention provisoire, son procès est renvoyé au 13 février. Le gendarme mobile le moins amoché, a, quant à lui, déjà rejoint son escadron qui était engagé à Paris ce samedi 12 janvier pour la 9e mobilisation des gilets jaunes : « Le week-end dernier, on a franchi un cap de violence de façon significative. Sur l’instant, je ne me suis pas vraiment rendu compte de ce qui se passait. C’est après, en voyant les images, que j’ai compris la détermination de l'individu en face de moi et la violence de l'ensemble de la manifestation », nous explique-t-il avant de poursuivre : « Le moral est là. Heureusement, je peux compter sur l'ensemble de mes camarades pour me soutenir. Ce qui s’est produit ne change rien à ma motivation et à mon envie de faire mon travail. En gendarmerie mobile, on s'attend à ce qu'il y ait de la violence. »

À la suite de cet événement, et pour mieux comprendre le travail de la gendarmerie mobile, nous avons suivi l’escadron des deux gendarmes blessés.

Avoir l’esprit militaire et l’esprit de cohésion.

Être gendarme mobile, c’est avant tout être disponible. En mission extérieure 250 jours par an, avec notamment un séjour en Outre-Mer de trois mois, ils naviguent au gré de l’actualité et assurent la tranquillité publique dans le cadre de la protection des personnes et des biens.

Une bonne condition physique et aimer le contact humain sont des atouts essentiels à la carrière d’un gendarme mobile, mais pas seulement. Avec une mutation environ tous les quatre ans, c’est toute la famille qui doit être mobile et qui doit recommencer à zéro : « Les séquences dites de disponibilité et d'indisponibilité font que le métier et la vie de famille sont totalement à l'opposé de ce que vivent les gens tous les jours. Vouloir être gendarme mobile, c'est avoir envie de vivre ensemble, d'aimer la fraternité, la camaraderie et la cohésion, puisque c'est notre force. C'est le fondement, le socle de la structure de la gendarmerie mobile », nous explique le commandant de l'escadron de gendarmerie mobile. Les prévisions des missions peuvent changer, et chacun doit l’adapter dans sa sphère privée : « On ne peut pas aller tout le temps dans la famille, ou partir à droite à gauche. On ne perd pas nos jours de repos, ni nos permissions. On doit juste se réorganiser », relativise l’un des membres de l’escadron.

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Une formation complète

La formation générale délivrée en École de gendarmerie ou celle plus spécifique du maintien de l'ordre, les prépare à affronter l'ensemble des tâches confiées et à dégrossir l'approche de chaque mission. Cela permet à un gendarme ou à un jeune officier projeté dans sa nouvelle unité de pouvoir répondre aux besoins immédiats de ses chefs.

« Nous sommes tous perfectibles lorsque l'on commence un nouveau métier. Petit à petit, on gagne de l'expérience ; ce qui nous permettra de donner le meilleur de nous-même sur le terrain », raconte un lieutenant avant de poursuivre : « J'ai décidé de devenir mobile car au cours de ma formation à Montluçon, c'est ce qui m'a le plus attiré. Et une fois que j'ai goûté au métier et que le rythme me plaisait vraiment, j'ai poursuivi jusqu'à passer le diplôme d'arme et devenir gradé d’encadrement. J'ai ensuite pris des responsabilités au sein de l'escadron où j'étais. Lors de mes différents entretiens de notation, mes commandants d'unité avaient repéré un éventuel potentiel pour devenir officier. Je me suis alors inscrit à la préparation, qui m'a été intégralement financée par la gendarmerie. C'est ce qui m'a permis de réussir le concours semi-direct et d'intégrer l'École des officiers de Melun. »

Au-delà de la formation pluridisciplinaire initiale délivrée en École, une formation continue, au fil de l'eau, permet d’acquérir des compétences professionnelles, techniques et variées. Devenir conducteur poids lourd ou faire de l'intervention professionnelle est un peu différent, et pourtant, les deux font partie de la gendarmerie mobile.

Des missions variées sur tout le territoire

Le maintien ou le rétablissement de l'ordre public ne sont que l’une des nombreuses missions de la gendarmerie mobile. L'hiver, certains font du renfort en montagne : « Lors de ces missions, nous sommes perçus comme nos collègues gendarmes départementaux. Nous réalisons aussi des missions de police des audiences et des escortes, mais également des missions de prévention et de lutte contre l'immigration clandestine par exemple. Nous sommes vraiment formés pour tout faire », nous détaille le commandant de l'EGM.

La gendarmerie mobile peut être engagée sur tout le spectre des crises. D’un effectif de plus de 12 000 personnels, elle agit au quotidien pour maintenir, voire rétablir l’ordre et pour renforcer la sécurité générale en luttant contre la délinquance. Elle est ainsi capable d’être projetée sur l’ensemble du territoire national, en métropole, en outre-mer, ainsi qu’à l’étranger : « L'engagement a encore été très varié cette année. Après notre mission en station de ski, nous sommes descendus plus tôt pour partir à Notre-Dame-des-Landes. Nous avons ensuite été envoyés à Mayotte, en déplacement outre-mer, puis nous avons été engagés sur les gilets jaunes », explique un sous-officier.

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Faire preuve de sang-froid

Depuis le 17 novembre et le début des manifestations des gilets jaunes, les forces de l’ordre ont été prises pour cibles par des casseurs. Leur image, parfois dégradée sur les réseaux sociaux ou dans certains médias, ne les empêche pas pour autant de faire leur travail avec courage et abnégation : « Quand on part sur une manifestation, on sait qu'on s'expose à de possibles violences, jets de projectiles ou même au contact des manifestants. C'est notre travail. On sait pourquoi on y va, on sait les risques que l'on prend. On se prépare à ça moralement et physiquement. On y fait face. Il n'y a aucun gendarme qui part sur une manifestation avec la peur ou la boule au ventre en se disant… peut-être que je vais vraiment ramasser aujourd'hui », raconte un sous-officier.

Être gendarme mobile, c’est faire un métier parfois méconnu, souvent incompris, comme l’explique cet adjudant : « notre métier ne consiste pas à aller au contact pour causer des torts à des manifestants qui sont là simplement pour exprimer un malaise. L'essentiel de notre travail, c'est de protéger les gens, c'est de servir, c'est d'être capable de sacrifier notre vie dans une situation qui est très dégradée, voire insurrectionnelle. »

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Un regard bienveillant

Le 11 janvier 2015, après les attentats contre Charlie Hebdo, de Montrouge et de la porte de Vincennes, les Français applaudissaient le travail des forces de l’ordre. Une marque de soutien, inédite, qui avait alors été très médiatisée. Mais aujourd’hui, alors que les manifestations des gilets jaunes battent leur plein, quels regards les Français portent-ils sur nos gardiens de la République ? « Au vu de l'ensemble des messages de soutien que l’on reçoit actuellement, je pense qu’il y a une grande partie de la population qui conçoit notre action et qui comprend la nécessité d'avoir des forces de sécurité présentes sur les manifestations », explique un lieutenant avant de conclure : « Il faut regarder les poignées de main, les mains qui nous sont tendues dans la rue en nous félicitant, en nous tapant sur l'épaule, en nous disant ''on est avec vous, on vous soutient, ce que vous faites c'est bien''. Voilà, ces messages-là sont importants, et nous font du bien. Je pense qu'il y a une majorité de Français qui est avec nous et une minorité de gens qui est contestataire par nature et veut absolument nous causer du tort soit directement, comme on a pu le voir le 5 janvier, soit via des images qui sont détournées, instrumentalisées, pour faire passer les forces de l'ordre et les ''forces du gouvernement'', comme elles sont appelées, pour des méchants. Et ça, ce n’est pas nous, ce n’est pas ce que l’on représente. »

Après l’acte 9 des gilets jaunes, et au vu des prochaines manifestations déjà annoncées, l’escadron sera encore engagé sur Paris d’ici la fin du mois de janvier.

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