Lutte contre la traite des êtres humains : une formation interprofessionnelle innovante

  • Par l'aspirante Morgane Jardillier
  • Publié le 04 juillet 2019
La garde des Sceaux, Nicole Belloubet et le secrétaire d’État auprès du ministre de l'Intérieur, Laurent Nunez, sont allés à la rencontre des stagiaires lors de la première journée de cette formation à la lutte contre la traite des êtres humains organisée dans les locaux de la gendarmerie, au CNFPJ.
© MI DICOM

Alors que plus d’un millier de victimes de Traite des êtres humains (TEH) ont été identifiées en France, en 2018, cinquante professionnels ont expérimenté un nouveau mode de formation dans le domaine de la lutte contre la TEH, du 1er au 5 juillet, au sein du Centre national de formation à la police judiciaire, à Rosny-sous-Bois.

Exploitations sexuelles, par le travail, contraintes à commettre des délits ou à mendier… Plus d’un millier de victimes de Traite des êtres humains (TEH) ont été identifiées, l’année dernière, en France. Afin de garantir l’accès aux droits des victimes de TEH et poursuivre les auteurs, il est donc nécessaire de former de façon transverse tous les acteurs impliqués.

Cinquante professionnels (magistrats, enquêteurs, avocats et travailleurs sociaux) ont ainsi expérimenté, du 1er au 5 juillet dernier, un nouveau mode de formation continue, inédit en France, dans le domaine de la lutte contre la traite des êtres humains : le « serious game » ou mise en situation interprofessionnelle.

Née d’une coopération institutionnelle, cette formation a été conçue et mise en œuvre par l’École nationale de la magistrature, la gendarmerie nationale, l'office central pour la répression de la traite des êtres humains, la brigade de répression du proxénétisme, le Barreau de Paris, le Bus des femmes, ALC Dispositif Ac.Sé, l’association Hors la rue et l’École nationale de protection judiciaire de la jeunesse.

Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l'Intérieur.

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Le serious game : une nouvelle pédagogie

Cette formation est une première en France. Ce format pédagogique du « serious game » s’inscrit pleinement dans une volonté de réfléchir aux meilleurs moyens de transmettre les savoirs et les bonnes pratiques.

Ainsi, pendant cinq jours, 24h sur 24, enquêteurs, magistrats, avocats et travailleurs sociaux ont été immergés dans une mise en situation professionnelle grandeur nature, organisée dans les locaux de la gendarmerie nationale, au sein du Centre national de formation à la police judiciaire (CNFPJ), à Rosny-sous-Bois. Ils ont ainsi joué leur propre rôle face à des acteurs interprétant les victimes et les auteurs.

« Au-delà des guides ou des fiches réflexes (…) , il reste désormais à trouver de nouveaux dispositifs pédagogiques qui, au travers de mises en situation proches de la réalité, marquent encore plus les esprits des personnels formés et enrichissent leur expérience par des situations non uniquement théorisées mais vécues », explique le général d’armée Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie nationale.

Les professionnels ont ainsi dû prendre des décisions, se coordonner, rédiger les actes usuels (réquisitions, signalements…), accompagner les victimes (auditions, accompagnement social et juridique, prise en charge) et conduire les investigations permettant d’interpeller les auteurs des faits. Tout au long de cet exercice, ils ont été aiguillés par une équipe de direction composée de professionnels issus des différentes institutions et structures.

« Il est démontré maintenant que la formation est le lieu le plus adapté aux échanges et à l’amélioration des pratiques, surtout lorsqu’il s’agit d’une chaîne pénale, où chaque maillon est tributaire de la qualité du travail fourni par le maillon précédent. Apprendre en faisant, plutôt qu’en écoutant ou en lisant, apprendre ensemble en confrontant les pratiques, voilà les maîtres mots qui ont présidé à l’organisation de cette session », explique Olivier Leurent, directeur de l’École nationale de la magistrature (ENM).

La garde des Sceaux, Nicole Belloubet, lors de l'ouverture de la formation.

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Le CNFPJ : un site idéal pour cette formation

Le centre national de formation à la police judiciaire de la gendarmerie nationale est un centre d’excellence en charge de former chaque année plus de 1 700 personnels aux techniques d’enquêtes les plus pointues. Il couvre un large spectre : techniques d’audition, enquêtes complexes, criminalistique (formation des techniciens en identification criminelle), technologies numériques, observation-surveillance et techniques spéciales d’enquête (sonorisation, captation d’images, géolocalisation, gestion des sources humaines de renseignement…), renseignement criminel (traitement global de l’information d’intérêt judiciaire), analyse criminelle (exploitation des données d’une enquête judiciaire), lutte contre le travail illégal et les fraudes, lutte contre la délinquance économique et financière, lutte contre les atteintes à l’environnement et la santé publiques.

Dix-sept salles de cours, des salles de mise en situation, une réplique de cour d’assises, des sites extérieurs, 284 postes de travail, des capacités de restauration et d’hébergement… Avec un tel environnement adapté aux formations spécialisées, il était donc naturel pour la gendarmerie d’accueillir et de soutenir cette formation à la lutte contre la traite des êtres humains.

Les unités gendarmerie totalement impliquée dans la lutte contre la TEH

La gendarmerie a, depuis des années, mis en place un dispositif spécifique afin de lutter efficacement contre ce phénomène, qui relève bien souvent de la criminalité organisée.

Sur le plan répressif, outre l’action des brigades territoriales, dès lors que les faits relèvent de la délinquance ou de la criminalité organisées, les investigations sont diligentées par des unités spécialisées en matière de police judiciaire : brigades de recherches, sections de recherches et offices au plan national.

La traite d’être humains aux fins d’exploitation par le travail ou de placement des conditions d’hébergement indignes relève de la compétence de l’Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI). Cet office constitue le point d’appui le plus important pour les différents partenaires réunis dans le cadre de cette formation.

La traite d’être humains aux fins de commission d’un crime ou d’un délit contre les biens (vols a la tire ou vols avec effractions) relève en revanche de la compétence de l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI).

« Nous savons tous, que malgré nos engagements et notre meilleure volonté, il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour optimiser collectivement notre dispositif de lutte contre la traite des êtres humains. C’est bien l’ambition que porte cette formation innovante que celle de faire bouger nos lignes institutionnelles pour nous mobiliser ensemble, non plus uniquement sur le terrain, mais dès la phase d’appropriation de ce contentieux », conclut le directeur général de la gendarmerie nationale.

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