La DGGN à l’épreuve de l’ouragan Irma

  • Par la Capitaine Céline Morin
  • Publié le 01 octobre 2017
© Sirpa Gend © BRC F. Garcia

Septembre 2017 – La gendarmerie projette d’importants moyens humains et matériels à Saint-Martin pour assurer ses missions de sécurité et d’ordre public, malgré des conditions très dégradées.

Ouragan classé catégorie 5, Irma frappe les Antilles dans la nuit du 5 au 6 septembre, dévastant les îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy. Les destructions sont considérables, particulièrement à Saint-Martin. Les réseaux d’eau potable, d’électricité et de communications sont hors service et les axes coupés.

Anticipation à tous les échelons

En anticipation, la Cellule interministérielle de crise (CIC) du ministère de l’Intérieur est activée dès le 5 septembre, de même que la cellule Beauvau au sein du cabinet du directeur général de la gendarmerie. En lien avec la DGGN et le CGOM, cette dernière est en mesure de fournir, H.24, au directeur général une synthèse de situation actualisée, mais aussi de l’accompagner en CIC, pour lui apporter les informations lui permettant de répondre aux sollicitations des autorités politiques et ainsi faciliter la prise de décision. En deux semaines, la CIC siège une vingtaine de fois, jusqu’à quatre réunions par jour au pic de la crise, parfois sous l’autorité du président de la République ou du Premier ministre et souvent sous celle du ministre de l’Intérieur, afin de coordonner l’action des services de l’État.

Parallèlement, la Direction des opérations et de l’emploi (DOE) met en œuvre son Centre des opérations (CDO). Cette cellule de crise, principalement armée par des personnels du Centre de planification et de gestion de crises (CPGC), auxquels s’agrègent d’autres cellules en tant que de besoin (finances, ressources humaines…), recueille, vérifie et synthétise les informations du terrain, afin d’avoir une vision précise et en temps réel de la situation et de concevoir des options stratégiques. En parallèle, le groupement tactique de gendarmerie de Guadeloupe est prépositionné à Saint-Martin.

Gestion de l’urgence

Dès le lendemain de l’ouragan, le général Jean-Marc Descoux, commandant la gendarmerie (Comgend) de Guadeloupe, rejoint Saint-Martin en hélicoptère pour y superviser le dispositif gendarmerie présent (190 personnels) et les renforts à venir, dans un premier temps depuis la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane, puis de métropole. Le général est d’ailleurs très vite nommé coordonnateur du pôle sécurité publique par le président de la République. Dans le même temps, à la DGGN, la DOE est à la manœuvre et coordonne l’action des directions et services concernés dans une manœuvre interministérielle globale. La mission première est de rapidement envoyer sur place les moyens nécessaires, puis d’articuler la montée en puissance. D’autant que les volets ordre public et police judiciaire redeviennent vite prioritaires.

Un harpon du CPGC projeté sur place

Un Groupe de planification opérationnelle (GPO) de sept militaires se pose à Saint-Martin le 7 septembre. Ce harpon du CPGC, composé de spécialistes de l’opérationnel, des Systèmes d’information et de communication (Sic), d’un logisticien et d’un géomaticien, a pour objectif de gérer l’urgence en formant un noyau de résilience, auquel sont agrégées les compétences locales, puis les renforts. Outil d’aide à l’organisation et à la décision, le GPO propose son expertise au Comgend en termes de manœuvre opérationnelle, d’architecture du commandement (création d’un état-major en base arrière), de détermination des besoins en matériels et en renforts, d’organisation de l’acheminement de la logistique et des mouvements de personnels.

 

 

Rétablir les communications

Le géomaticien du CPGC fournit des cartes actualisées aux autorités. Les deux Sic de Saint-Martin et de Saint-Barth’, renforcés dès le 6 septembre par 7 militaires de Guadeloupe, de Martinique et de Guyane, puis par les deux personnels de la section Sic projetable du CPGC, travaillent au rétablissement des capacités de communication des services de l’État. La mobilisation s’organise également en métropole : le ST(SI)2 pour la conduite globale de la manœuvre Sic, le Service de traitement de l’information gendarmerie pour la remise en fonctionnement du réseau de radiocommunication Quartz et le Service central des réseaux et technologies avancées pour la projection de matériels.

La manœuvre Sic voit le rétablissement d’une visioconférence avec la métropole dès le 7 septembre. Elle permet aux autorités préfectorale et gendarmerie de communiquer avec la CIC Beauvau. En moins de cinq jours, compte tenu de l’absence de couverture GSM, la task force Sic déploie des réseaux de circonstance pour la gendarmerie et les services de l’État, et rétablit le réseau Quartz raccordant les deux îles au reste du monde.

Le CDO, chef d’orchestre

Depuis la métropole, le CDO détermine les besoins en lien avec le théâtre, veille à la bonne remontée des informations jusqu’aux autorités, orchestre la projection de moyens humains et matériels et enfin assure le suivi des visites présidentielle et ministérielles. En lien avec la DPMGN (Direction des Personnels Militaires de la Gendarmerie Nationale) et le CRG (Commandement des Réserves de la Gendarmerie), le bureau de l’ordre public est en charge de la génération de forces.

Il organise les bascules intrathéâtre ainsi que l’envoi de renforts nationaux et d’unités spécialisées telle l’unité d’investigations et d’identification de l’IRCGN. Le 12 septembre, le dispositif atteint 652 militaires, de tous grades, statuts et spécialités. Un appel à volontaires est lancé par la DMPGN et le CRG pour identifier une ressource rapidement projetable : 3 706 militaires d’active et 662 réservistes y répondent.

Une manœuvre logistique essentielle et complexe

La manœuvre logistique, rendue complexe par l’éloignement et la double insularité de Saint-Martin, repose sur la Direction des soutiens et des finances, en lien avec le Comsop (Commandement du Soutien Opérationnel de la gendarmerie nationale) et le Service de l’achat des équipements et de la logistique de la sécurité intérieure. Un groupe de suivi « log-RH » est mis en place. Les décisions se prennent très rapidement grâce à des circuits courts et des procédures adaptées à la situation. La chaîne de soutien s’articule très vite, afin de répondre aux besoins du terrain, en termes opérationnels, mais aussi en matière d’hygiène, d’assainissement, de restauration…

Le Comsop envoie sur place cinq personnels du Service de soutien à la projection opérationnelle (SSPO) et deux spécialistes du Centre national de soutien logistique. Les premières projections de matériels s’effectuent dès le lendemain de l’ouragan. Sont ainsi acheminés des véhicules, un camp de base vie d’une capacité de 80 personnels, 400 lits picots, des dômes moustiquaires, des toilettes chimiques, des douchettes, des cuisines de campagne, des centaines de rations de combat, des dizaines de milliers de bouteilles d’eau, des kits hygiène, du gel hydroalcoolique.

Il faut aussi expédier des tenues, des sérigraphies ainsi que des gyrophares pour permettre l’identification des gendarmes. Les crédits nécessaires à l’achat des équipements manquants sont immédiatement dégagés. Durant la phase de stabilisation, la DGGN continue d’assurer la coordination des moyens et l’appui opérationnel. Elle identifie les nouveaux besoins, adapte les dispositifs et prépare l’avenir jusqu’à la sortie de crise.

La communication en appui de l’opérationnel

En appui du volet opérationnel, la manœuvre de communication est menée par le Sirpa depuis le théâtre, où des personnels sont rapidement projetés, et depuis la métropole. Elle permet de valoriser la forte mobilisation des forces, de rassurer la population sinistrée quant à la prise en compte des attentes sécuritaires, mais surtout d’anticiper et de répondre aux polémiques et fausses rumeurs qui viennent parasiter l’action de l’État.

Accompagnement des personnels

Outre l’appui capacitaire, la DPMGN pilote un important volet d’accompagnement des personnels. Au lendemain de la catastrophe, une adresse dédiée est ouverte pour répondre aux questions des familles (dpm-irma@gendarmerie.interieur.gouv.fr). Deux experts R.H. partent aux Antilles pour examiner les situations individuelles des militaires sinistrés et recueillir leurs vœux. Un sas de décompression est installé en Guadeloupe avec la projection de deux psychologues de la Section psychologie soutien intervention. Un numéro de téléphone est également mis en place en Guadeloupe et en métropole.

La DPMGN prend en charge le rapatriement des familles en métropole (billets, accueil à l’aéroport, réservation d’hébergement, documentation récapitulant les offres d’accompagnement et les contacts utiles). L’Action sociale des armées constitue des dossiers de secours depuis la Guadeloupe, en liaison avec le bureau d’action sociale et le réseau des assistants de service social.

S’inscrire dans la durée

À l’heure de la reconstruction, la mobilisation se poursuit : remise en état progressive des réseaux, organisation de la relève… Fort d’un vivier de 300 réservistes, le CRG déploie un détachement de 73 personnels le 27 septembre, puis un deuxième le 26 octobre, en relève des EGM. Des militaires ayant répondu à l’appel à volontaire ont été envoyés pour des missions de courtes durée dans les unités de la compagnie de Saint-Martin et Saint-Barthélémy. Le directeur général a par ailleurs décidé d’expérimenter outre-mer un dispositif tournant de personnels de réserve et d’active en missions de courte durée en remplacement d’affectations dans des brigades territoriales.

À plusieurs reprises, le général Lizurey a souligné « la capacité de mobilisation exceptionnelle » et « l’activité remarquable » de tous les personnels de la gendarmerie tout au long de cette crise, pour laquelle l’organisation opérationnelle et logistique intégrée de la gendarmerie ainsi que la mobilisation de toute la chaîne de commandement ont permis une gestion optimale.

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