Le ST(SI)², innover pour et par le gendarme et pour la population

  • Par le commandant Céline Morin
  • Publié le 15 juin 2020
© MAJ F. Balsamo

Revenant sur les enjeux de la digitalisation de la société, le général de corps d’armée Bruno Poirier-Coutansais, chef du ST(SI)2 , explique, exemples à l’appui, comment son service s’emploie à maintenir la gendarmerie en bonne position dans la course technologique et numérique.

Quels sont aujourd’hui les enjeux de la digitalisation de notre environnement ?

Les enjeux sont de plusieurs ordres. Le premier est de continuer à être parfaitement au niveau dans l’emploi des technologies et des techniques, dans une société qui, dans toutes ses composantes, est de plus en plus concernée par l’évolution et l’omniprésence numériques et digitales. C’est important à double titre. Tout d’abord, il est essentiel que le gendarme, dans son quotidien, bénéficie au travail d’un environnement technologique identique, voire supérieur à celui qu’il utilise dans sa vie privée. Ensuite, pour être efficace dans une société de plus en plus digitale, il faut être en mesure d’inscrire tout le panel des actions menées par la gendarmerie dans ce nouvel environnement

Le contact reste une priorité absolue, mais il faut également être présent sur les autres dimensions de notre activité et donc développer une proximité numérique afin d’échanger dans les meilleures conditions possibles avec nos interlocuteurs et avec la population. Cette logique de territoire numérique nécessite la mise en œuvre de modes opératoires adaptés, qui ne sont finalement que la transposition au numérique de ceux que l’on applique dans nos zones de compétences traditionnelles, combinant actions de prévention, de formation et de répression.

La délinquance se développe elle aussi de manière extrêmement importante sur ces nouveaux territoires et, aujourd’hui, rares sont les enquêtes qui ne nécessitent pas la mise en œuvre de moyens techniques pour exploiter des supports désormais classiques, comme la téléphonie, ou les objets connectés, qui connaissent une expansion rapide. Le recueil de la masse d’informations qu’ils contiennent, précieuse pour l’enquête judiciaire, nécessite un savoir-faire technique de plus en plus évolué.

Comment la gendarmerie s’y prépare-t-elle ?

Sur le principe du bench marking, nous analysons les risques en observant ce qui se fait dans d’autres pays, répondant aux mêmes normes démocratiques que le nôtre, en observant de quelle manière les grandes organisations, les grandes sociétés, publiques ou privées, se transforment et s’adaptent… Sachant qu’une des difficultés est de trouver un équilibre entre ce que permet la technique au profit de l’efficacité opérationnelle et ce qui est acceptable sur le plan de la protection des libertés individuelles.

Le cadre juridique est à ce titre dimensionnant. On le voit par exemple pour la reconnaissance faciale, qui génère un débat important en France, tandis qu’elle est déjà très développée dans les pays anglosaxons. Un des enjeux majeurs de ce nouvel environnement digital de plus en plus ouvert est également de garantir la sécurité et la résilience des systèmes d’information contre les risques de malveillance et de cyber-attaques.

Il y a enfin une dimension de maîtrise et de souveraineté nationale concernant un certain nombre de technologies. Ainsi, au lieu de nous fournir sur étagère auprès de prestataires très souvent étrangers, nous faisons régulièrement le choix de technologies que nous allons maîtriser de manière à en assurer à la fois le développement et la sécurité face à une exploitation malveillante de nos données. Cette stratégie, que l’on développe depuis plusieurs années, s’appuie sur une ressource humaine interne possédant des compétences de haut niveau dans le domaine scientifique et technique. C’est d’ailleurs une politique que le directeur général souhaite amplifier.

On peut donc parler de véritables pôles de compétences…

En effet, le ST(SI)2, service commun à la police et à la gendarmerie, est un pôle de compétences fort de 350 personnels, parmi lesquels 140 gendarmes de tous grades, 70 policiers et de nombreux personnels civils à compétences techniques, ingénieurs ou techniciens. Les gendarmes, officiers et sous-officiers, sont tous de formation scientifique, avec une expérience du terrain qui permet une meilleure compréhension des besoins comme des contraintes dans la prise en compte de nos projets. Les officiers, tous ingénieurs, ont une carrière à dominante, alternant des postes techniques et des postes de commandement opérationnels (COB, CIE ou EGM, GGD...).

Les sous-officiers, également issus du terrain avant d’être formés dans le cadre du DTSIC, exercent des fonctions de développement et, dans un certain nombre de cas, de direction de projet. Toutefois, le ST(SI)2 n’est pas seul, il s’appuie sur le Service de développement et de mise en œuvre des logiciels (SDML - 75 personnels) et sur le Service de traitement de l’information gendarmerie (STIG), véritable data center de la gendarmerie, dont les 170 personnels, presque tous militaires, sont les garants du fonctionnement permanent de tous nos systèmes, dont les plus critiques (FPR, TAJ, Foves, BDSP…).

Comment le ST(SI)² s’emploie-t-il à faire évoluer les outils métier du gendarme et comment cela se matérialise-t-il ?

Le ST(SI)2 ne fait pas la transformation numérique, il l’accompagne et la rend possible. Notre ambition n’est autre que de faciliter le travail quotidien du gendarme dans tous les domaines, que ce soit celui de l’opérationnel, de la gestion, de l’organisation… Nous cherchons en premier lieu à développer des outils utiles, facilitant le travail au quotidien et qui génèrent à la fois des gains de temps, de l’aide à la décision et la possibilité de travailler en mobilité. En lien étroit avec les différentes directions, le ST(SI)2 propose au directeur général des axes de travail en adéquation avec ses priorités opérationnelles.

Le premier d’entre eux, sur lequel nous travaillons depuis plusieurs années, c’est la logique du travail en mobilité. Cela s’est naturellement traduit par le projet NÉOGEND, qui a tout de suite offert un certain nombre de fonctionnalités, dont le contrôle de fichiers, la prise de notes, le partage d’informations… Une offre que nous enrichissons régulièrement avec l’ajout de nouvelles fonctionnalités. Actuellement, nos services travaillent, par exemple, sur la commande vocale des smartphones. Un de nos objectifs est de permettre la réalisation de comptes rendus dans BDSP, puis dans PULSAR, en utilisant le « speech to text ».

Nous conduisons également un important travail en matière de cartographie, qui s’est déjà concrétisé par le développement d’IDIC-SI. Les prochaines évolutions verront la possibilité de visualiser sur NÉO la position des patrouilles et des personnels présents sur un secteur géographique. Outre la plus-value opérationnelle, cela ajoutera à la sécurité des personnels. Demain, et même plus vite puisque la technologie est déjà en phase de test, le projet PC STORM offrira la capacité de changer de génération de radio, en faisant de NÉO un support non seulement de téléphonie mais également de radio, autorisant l’échange vocal, mais également d’images et de données.

Nous développons aussi de nombreux outils d’aide à la décision, à l’instar du système d’information d’aide à la conception et à la conduite du nouveau Dispositif de gestion des événements (DGE) et, à court terme, des outils d’aide à la conception de service à destination des commandants de communauté de brigades, qui leur permettra d’optimiser l’emploi des ressources en prenant en compte l’ensemble de leurs contraintes. Dans un tout autre domaine, le ST(SI)2 assure toutes les évolutions du SIRH Agorh@. Le succès du nouveau logiciel de solde de la gendarmerie, déployé le 1er janvier 2019, illustre le haut niveau technique et de maîtrise des personnels du service, puisque le changement de système sensible n’a eu aucun impact sur la solde des gendarmes.

La prochaine étape dans ce domaine est le déploiement d’Agorh@ Compétences, qui complétera l’offre de services, tournée à la fois vers le militaire et son gestionnaire. Nous travaillons aussi avec la DPMGN sur une offre en matière d’aide à la mobilité, qui permettra aux personnels d’effectuer des simulations dans la préparation de leur fiche de vœux. Beaucoup de choses sont faites à destination du gendarme, mais nous sommes également tournés vers la population, pour qui nous développons une offre de services, à l’instar de la brigade numérique, de la prise de rendez-vous ou encore de la plainte en ligne, dont l’objectif est d’organiser la proximité et l’échange d’informations sur l’espace numérique.

Dans un proche avenir, à quelles nouvelles évolutions doit-on s’attendre ?

NÉO fait bien évidemment toujours partie des sujets d’avenir. On peut d’ailleurs dire que nous ne sommes qu’au début de son histoire. L’objectif de NÉO n’est pas uniquement de permettre la portabilité de ce que l’on fait au bureau, mais bien de repenser, grâce à un outil de mobilité, l’ensemble des modes d’action de la gendarmerie. Je pense, par exemple, à l’exploitation des informations enregistrées nativement par l’appareil.

L’objectif est donc de pouvoir présenter des comptes rendus pré-rédigés grâce aux informations contenues dans NÉO (géolocalisation) et aux actions que le militaire aura réalisées durant sa patrouille, comme l’interrogation de fichiers. Ce dernier aura simplement à les valider en fin de service. À mon sens, la mobilité reste l’un des axes majeurs, l’autre relevant de l’aide à la décision, c’est-à-dire l’exploitation de toutes les données disponibles pour faciliter, à tous les niveaux de la hiérarchie, la prise de décision en disposant d’informations pertinentes.

Cela veut dire, par exemple, être en mesure de diffuser automatiquement un certain nombre d’alertes lors d’une mission, permettant d’informer les personnels des interventions réalisées dans un périmètre géographique restreint sur une période récente ou encore de la présence d’un risque potentiel sur le secteur. Autant d’informations utiles à la sécurité des gendarmes.

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