Lutte contre l’immigration clandestine : l’exemple des Alpes-Maritimes

  • Par la capitaine Marine Rabasté
  • Publié le 29 décembre 2021
© GND F. Garcia

En vigueur depuis 2015, à la suite des attentats terroristes qui ont lourdement frappé le pays, le renforcement du contrôle aux frontières intérieures implique, pour la gendarmerie mobile, le maintien d’une posture permanente pour lutter contre l’immigration clandestine.

Dans l’espoir d’y trouver une terre d’accueil ou simplement pour transiter vers une destination plus lointaine, nombreux sont les individus entrant et circulant irrégulièrement sur le sol national. Motivés par des raisons politiques, sociales ou économiques, ces mouvements de personnes cachent une véritable délinquance organisée, allant de la fourniture de faux documents d’identité au trafic d’êtres humains, et constituent alors une menace directe à la sécurité publique de l’État.

Face à ces risques, la Lutte contre l’immigration clandestine (LIC) a été érigée en volet majeur de la politique de maîtrise des flux migratoires et a considérablement été renforcée ces dernières années, au regard d’une menace sécuritaire de plus en plus prégnante.

De nombreux Escadrons de gendarmerie mobile (EGM) assurent, tout au long de l’année, cette mission sur l’ensemble du territoire national. Dans les Alpes-Maritimes, le contrôle des frontières françaises constitue aujourd’hui un véritable enjeu. Par sa proximité avec Vintimille, le département est en effet particulièrement exposé à la problématique migratoire. Près de 180 gendarmes mobiles y sont constamment déployés, aux côtés des autres services de l’État.

Menton, porte d’entrée principale

À quelques pas des touristes venus profiter de la Côte d’Azur, c’est une tout autre réalité qui se cache dans l’envers du décor de Menton. Chaque jour, des centaines de migrants tentent de rejoindre la France. Certains choisissent de longer la mer ou d’emprunter la voie routière, parfois sans le consentement des conducteurs. D’autres n’hésitent pas à passer à pied sur la voie ferrée, au péril de leur vie. Tout le long de la frontière, la gestion des flux migratoires est devenue le quotidien des forces de sécurité intérieure.

Au poste frontière de Saint-Ludovic, l’un des principaux points de passage autorisés, neuf gendarmes mobiles sont constamment présents pour contrôler les véhicules en provenance d’Italie et surveiller la frontière quelques mètres plus haut, le long de la ligne de chemin de fer, ou via le système de vidéo-protection. Ici, c’est un va-et-vient continu qui s’observe. Chaque jour, des dizaines de migrants sont remis à la Police aux frontières (PAF) par les gendarmes, puis renvoyés vers l’Italie. « On les voit repartir, mais dans quelques jours, ils emprunteront de nouveau ce chemin pour tenter d’entrer en France. Sur la voie ferrée, on en voit 5 ou 6 par nuit. La plupart se disent majeurs, mais on a parfois à faire face à des mineurs », explique un gendarme de l’EGM de Sathonay-Camp, présent au niveau de la guérite jouxtant la voie ferrée.

Dans la profondeur, les militaires d’un deuxième EGM se relaient aux sorties de l’autoroute A8, axe central du département. Deux sorties sont principalement ciblées : la 58 et la 59. Elles sont les premières avant le péage de La Turbie, tenu par les CRS. Des patrouilles sont également missionnées pour sillonner les axes, principaux comme secondaires, de la zone. De Castellar à Menton. Les gendarmes mobiles réalisent en effet près d’un tiers de l’ensemble des contrôles du secteur, les deux autres étant effectués sur le point de passage autorisé de Saint-Ludovic.

Sospel, porte d’accès dérobée

Pour éviter les contrôles à la frontière franco-italienne, des dizaines de migrants privilégient un passage par les Alpes. Par les sentiers et les chemins escarpés, ils atteignent en quelques jours le village de Breil-sur-Roya, où ils peuvent ensuite emprunter la ligne de chemin de fer qui les conduira jusqu’à Nice. D’autres se font également déposer côté italien, à proximité des principaux points de passage sur la zone frontalière.

À quelques kilomètres de là, en plein cœur de la vallée de La Roya, un EGM contrôle la zone de Sospel, et notamment sa gare TER. Ici, le train ne s’arrête que quelques minutes, mais cela suffit aux militaires pour contrôler l’ensemble des voitures, où il n’est pas rare de se retrouver en présence d’individus entrés irrégulièrement en France. En raison des difficultés d’accès, les vallées de la Roya-Bevera ne semblaient pas être, de prime abord, un vecteur majeur de l’immigration clandestine. Néanmoins, depuis quelques années, le milieu associatif d’aide aux migrants s’est fortement développé dans la région et nombreux sont ceux qui espèrent pouvoir y trouver refuge dès leur entrée en France. En conséquence, les gendarmes mobiles s’y sont déployés et procèdent à des contrôles statiques et dynamiques en plusieurs points de ce territoire. En complément des forces Sentinelle qui patrouillent sur les chemins de montagne, ils tiennent les axes routiers principaux ainsi que les points de passage autorisés, tels que celui du carrefour Saint-Gervais, et assurent une présence régulière sur celui de Fanghetto.

© GND F. Garcia

Un dispositif inter-services

Contrairement à d’autres dispositifs de LIC mis en place sur le territoire, qui dépendent directement des groupements de gendarmerie départementale, celui des Alpes-Maritimes a la particularité d’être directement placé sous la coordination opérationnelle de la PAF du département, depuis novembre 2016. L’action des trois EGM, sous le commandement d’un Groupement tactique de gendarmerie, s’inscrit en effet dans une manœuvre d’ampleur, à laquelle participent également trois Compagnies républicaines de sécurité (CRS), les unités territoriales de la police et de la gendarmerie, les douanes, ainsi que plusieurs services partenaires, tels que la SUGE (Sûreté ferroviaire de la SNCF) ou la société d’autoroute Escota.

Dans la mise en œuvre des mesures relatives aux entrées sur le territoire national, les liens entre la gendarmerie et la PAF sont étroits. Dès leur arrivée, les gendarmes mobiles bénéficient en effet d’une information de deux heures, dispensée par les policiers spécialisés, concernant la réglementation transfrontalière et les fraudes documentaires. La situation est d’autant plus complexe que plusieurs statuts se côtoient : les migrants, les ressortissants européens venant travailler en France, ainsi que ceux des pays européens ne faisant pas partie de l’espace Schengen. Et depuis 2020, le contexte sanitaire est venu s’ajouter aux difficultés de la mission.

Cette coopération avec la PAF se poursuit dans l’exercice des missions quotidiennes. Les gendarmes ne sont en effet pas habilités à refuser l’entrée en France de personnes qui se trouveraient en situation irrégulière. À la suite d’un contrôle, ils sont donc chargés de les mettre à disposition des policiers, qui réaliseront eux-mêmes la procédure de non-admission.

À la frontière, les gendarmes mobiles ont également à faire face à un autre type d’individus : les passeurs. S’ils ne font pas nécessairement l’objet d’une remise à la PAF, ils sont en revanche interpellés et remis au service de police ou de gendarmerie compétent, en vertu de l’article L622-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

La mission de LIC dans les Alpes-Maritimes est désormais devenue incontournable pour les EGM. Mais elle n’en est qu’une parmi d’autres. Sur l’ensemble des zones frontalières, des gendarmes mobiles sont fréquemment déployés afin de veiller à la sécurité du territoire, comme à Calais ou encore à Mayotte ou en Guyane. Les Outre-mer sont en effet soumis, comme le territoire métropolitain, à une forte pression migratoire.

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