Former des officiers opérationnels et bienveillants

  • Par le commandant Céline Morin
  • Publié le 03 février 2020
© EOGN

Créée il y a 100 ans, l’EOGN forme les officiers de gendarmerie et du corps technique et administratif à leurs futurs emplois. Le général de division Christophe Boyer, commandant l’école, revient sur l’évolution du rôle de l’officier et sur la nécessaire adaptation qui en découle en termes de formation.

Qu’attend-on aujourd’hui d’un officier, qu’il soit de gendarmerie (O.G.) ou du corps technique et administratif (OCTA) ?

De prime abord, il est attendu d’un officier de gendarmerie certaines vertus fondamentales telles que la compétence, la force de caractère et le désintéressement, afin que le chef rayonne de tout son être, pour favoriser, par ricochet, l’épanouissement de chacun de ses hommes. Mais en regardant de plus près, la formation dépend étroitement de trois facteurs :

- d’abord la sociologie de notre Institution. En l’espace de quelques décennies, la gendarmerie a vu passer son modèle de gendarme « généraliste », dans un esprit de proximité et de polyvalence, à un modèle où ce « brigadier » est de plus en plus « augmenté », notamment par l’apport du numérique. De fait, la part de confiance et d’initiative que l’on doit lui accorder est croissante. Ainsi, les officiers devront apprendre à déployer cette capacité à fédérer les énergies, les volontés et les savoir-faire de leurs subordonnés, techniciens chevronnés et exigeants ;

- la territorialité ensuite, facteur d’éloignement des officiers et consubstantiel à une large autonomie des subordonnés. Il leur revient donc de coordonner finement l’ensemble de leurs moyens et appuis ;

- enfin, l’essence même de notre Institution, plaçant ses chefs dans une triple subordination, celle de la chaîne hiérarchique et celle des autorités administrative et judiciaire, au sein de laquelle ils doivent s’imposer comme un autre point de convergence et de coordination.

Dans un monde particulièrement imprévisible, un socle éthique et déontologique robuste s’impose. Plus que jamais, notre force humaine doit disposer d’officiers porteurs d’une vision, de chefs en qui les subordonnés peuvent placer leur confiance et être eux-mêmes l’incarnation de valeurs auxquelles ils croient. En somme, donner du sens à l’action et être à l’écoute. Enfin, ils doivent être convaincus de l’importance à accorder au dialogue interne, constructif, professionnel et sain, qui leur permet de s’entourer des avis nécessaires à la prise de décision. Si, sous le signe de l’urgence, ils doivent s’imposer comme des chefs opérationnels qui décident, d’autant plus que la situation est grave, au quotidien, ils doivent demeurer ceux qui savent écouter et bien connaître leurs personnels pour, dans l’intensité de la crise, être à même de leur demander de se surpasser.

Concrètement, comment l’EOGN prépare-t-elle ses élèves à leurs futures missions ?

L’objectif premier de la formation initiale dispensée à l’EOGN reste de former des chefs militaires qui disposent d’une expertise dans le domaine de la sécurité intérieure et de la défense. À cette fin, nous nous appuyons sur trois leviers classiques :

- le savoir : c’est la connaissance du milieu militaire dans lequel les officiers vont évoluer et les connaissances juridiques sur lesquelles ils devront s’appuyer pour mener à bien leurs missions. Cela va de pair avec la militarité, laquelle leur permet de s’aguerrir pour être forts physiquement, psychologiquement et moralement, afin d’être en capacité de surmonter les événements de toute nature et commander en situation dégradée.

- le savoir-faire : les nombreuses mises en situation, ancrant les élèves-officiers dans le concret, permettent d’asseoir toutes les connaissances nécessaires à l’exercice de leur métier, du premier emploi aux suivants. Cet apprentissage se fait également à travers différents stages, dont le nombre a été multiplié par trois depuis 2017.

- le savoir-être : le futur officier doit disposer de qualités humaines et comportementales exemplaires, en nourrissant sa pensée pour agir en conscience et en responsabilité. Ce volet regroupe notamment les notions d’esprit de corps et de cohésion, qui permettent aux élèves-officiers de trouver leur place au sein de la gendarmerie et d’avoir une prise en compte plus aisée de l’éthique et de la déontologie. Cet enseignement repose également sur le partage d’expériences, sur des rencontres, des échanges avec des intervenants, autour de tous les problèmes contemporains auxquels les gendarmes peuvent être confrontés dans leur fonction de contact avec le public.

Enfin, le Master 2 dans lequel nous les accompagnons permet aussi de conforter leur place dans l’univers global de la sécurité et celle de l’EOGN dans le concert des grandes écoles françaises et européennes.

L’EOGN assure également les formations continues des officiers. Quels sont les enjeux dans ce domaine ?

L’EOGN assure en effet à la fois la formation initiale et la formation continue des officiers, ce qui nous permet d’avoir une cohérence d’ensemble. Tout l’enjeu est d’arriver à bâtir un socle commun, puis d’avoir une formation continue construite sur le principe du « juste à temps », dans la carrière, et du « juste utile », par rapport aux besoins.

L’une des nouveautés est la prise en compte de la conception de manœuvre, répondant à une attente forte de tous les officiers dans leurs différents postes. Cet apprentissage intègre désormais le volet logistique de la gestion de crise, lequel s’avère indispensable dans la conception de manœuvre opérationnelle. Comme sur le terrain, O.G. et OCTA sont amenés à travailler ensemble.

Au sein de l’EOGN, qui fête ses 100 ans cette année, la formation n’a eu de cesse d’évoluer au regard des besoins du terrain et des progrès technologiques. Comment se présente-t-elle aujourd’hui ?

L’infrastructure de l’école n’a pas évolué aussi vite qu’on l’aurait voulu. Malgré tout, nous avons réussi à nous inscrire dans une modernité d’adaptation qui soit la plus cohérente possible. Nous utilisons quatre méthodes d’enseignement. J’ai déjà évoqué les mises en situation et les immersions en unité. Les premières apportent du réalisme aux notions que nous inculquons et permettent aux élèves de développer leur sens de l’adaptation et du discernement. Les secondes, qui se traduisent par 12 semaines de stage pendant la scolarité, vont leur faire toucher du doigt la réalité de la gendarmerie dans son quotidien, aux confins des territoires. Ils vont ainsi pouvoir confronter les notions généralistes enseignées à la façon dont l’intelligence locale les décline. L’idée est aussi de leur montrer la complexité et la polyvalence de la gendarmerie dans toutes ses composantes, pour que cette ouverture puisse notamment les guider dans leur choix de début de carrière. C’est pourquoi ces immersions se font dans toutes les subdivisions et s’adaptent aussi au recrutement, afin de ne pas envoyer les élèves en terre déjà connue.

L’enseignement à distance se développe également, grâce à la plateforme Gendform 3.0. Gage de souplesse dans le dispositif global de formation, il permet aux élèves d’acquérir une partie de la formation élémentaire à leur initiative et de recentrer le temps ainsi libéré sur la mise en situation.

La quatrième méthode, la plus récente, repose sur la simulation. Le Centre d’entraînement et de simulation au commandement opérationnel (CESCO), inauguré en juin 2018, favorise la transition entre la théorie et les exercices pratiques. Nous utilisons deux programmes de simulation, l’un pour la planification et la conduite des missions, et l’autre pour l’apprentissage des actes élémentaires du combattant et les missions de groupe. Le prochain axe de développement concerne l’apprentissage du tir et l’usage des armes, pour favoriser, via la simulation, la réflexion et le discernement dans l’action. Des dispositifs sont d’ores et déjà utilisés, au sein de l’EOGN ou du centre national d’entraînement des forces de gendarmerie, mais nous travaillons en lien avec des industriels pour développer des outils plus sophistiqués. Cette dernière méthode ne doit évidemment pas occulter les autres.

Ainsi, s’appuyant sur une formation d’excellence et sur une identité aux racines profondes servant de fil rouge tout au long de sa carrière, l’officier de gendarmerie est apte à s’engager et à commander en tous temps et en tous lieux, au service de nos concitoyens.

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