La formation, au cœur des enjeux d'avenir

  • Par le commandant Céline Morin
  • Publié le 03 février 2020
© MAJ F. Balsamo

La qualité de sécurité apportée par la gendarmerie à la population repose sur son dispositif de formation. Aujourd’hui, près d’un quart des personnels en bénéficie chaque année, en cursus initial ou continu. Adaptation aux besoins, digitalisation des outils, « e-recrutement », parcours professionnels individualisés, logique de compétences, porosité entre les métiers… le général de corps d’armée Armando De Oliveira, directeur des personnels militaires de la gendarmerie nationale, fait le point sur les différents enjeux.

Qu’est-il ressorti des assises de la formation, organisées au printemps 2019 ?

Ces assises de la formation se sont déroulées de manière très ouverte, en présence de plus d’une centaine d’invités, issus d’univers variés. C’était un exercice d’introspection très enrichissant, adossé à une ouverture et à un regard extérieur qui sont nécessaires. De l’état des lieux que nous avons réalisé, je retiens tout d’abord que nous pouvons être fiers de nos écoles et de nos centres d’instruction, où les formateurs et l’encadrement, appuyés par une ingénierie pédagogique de grande qualité, dispensent des formations pertinentes, adaptées aux besoins du terrain. Ils se sont aussi emparés des nouvelles technologies avec créativité et innovation. Cela explique que notre capacité en matière de formation soit souvent évoquée de manière très positive par nos partenaires. Je souligne également notre engagement en matière de coopération internationale, notamment illustré par les formations initiales croisées d’élèves-gendarmes avec la garde civile espagnole. Le concept a suscité l’intérêt d’autres gendarmeries sœurs, comme les carabiniers italiens et la garde nationale républicaine portugaise.

Ces assises ont ensuite ouvert un espace d’échanges particulièrement riches entre professionnels de la formation, de la pédagogie et de la gestion de compétences. En substance, les trois tables rondes organisées sur les thèmes de « l’éducation aux valeurs de la gendarmerie », de « la transformation numérique dans l’ingénierie de formation » et du « développement d’une gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences », ont mis en évidence l’importance de l’apprentissage du savoir-être et de la robustesse, marqueurs forts du gendarme. Elles ont également confirmé la nécessité de construire des parcours professionnels individualisés, en phase avec les parcours de vie et valorisant les compétences et les expertises acquises.

À ce titre, je voudrais souligner l’importance du travail de remise à plat des Référentiels des activités et des compétences (RAC), réalisé en amont des assises. Tous les parcours ont été réexaminés, thématique par thématique, dans un souci de cohérence et d’efficience, afin de supprimer les doublons non pertinents au plan pédagogique mais aussi de compléter les programmes là où c’était nécessaire.

Quels sont aujourd’hui les enjeux pour la gendarmerie en termes de formation ?

Tout d’abord, en matière d’organisation, afin de gagner en cohérence et en efficacité, nous allons créer un opérateur unique du recrutement et de la formation. En termes d’enjeux, le premier est de garantir, à travers la formation, un véritable socle de compétences du gendarme et la qualité de la sécurité apportée par la gendarmerie à la population, en temps normal comme dans les situations les plus dégradées. Nous nous adaptons donc en permanence à l’évolution des besoins. À titre d’exemple, nous avons introduit, ces dernières années, dans le cadre de la PSQ, des modules de formation au contact et à la proximité. Nous avons également mis en place des formations à la gestion de crise pour être en mesure de réagir face à tous types d’événements, des catastrophes naturelles aux actes terroristes.

Le deuxième enjeu majeur est celui de la digitalisation de l’outil de formation, qui se traduit notamment par le développement des modules d’enseignement à distance. Leur usage connecté rend l’apprentissage accessible en tout temps et tout lieu, de manière plus ergonomique. Nous travaillons également au développement des outils de simulation qui, au gré des mises en situation, permettent de développer l’« intelligence pratique » et l’aptitude à la prise de décision des élèves et des stagiaires.

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Cette transformation numérique concerne toutes les générations et tous les niveaux de responsabilité. Le directeur général a d’ailleurs décidé la programmation d’une journée annuelle de formation complémentaire au numérique pour l’ensemble du personnel. Nous devons aussi répondre à l’enjeu du recrutement et remporter la double bataille de la concurrence et de la compétence, afin d’attirer les profils et les talents dont nous aurons besoin demain. Mais pour être entendus, visibles et compris, nous devons nous adresser aux jeunes générations sur les vecteurs de communication qui sont les leurs, en adoptant un langage qui leur est familier. Aujourd’hui, à l’étranger, certaines entreprises, comme McDonald’s, recrutent des collaborateurs au moyen de tests réalisés sur la base de jeux vidéo, permettant d’évaluer les potentiels en termes de concentration, d’adaptation et de réactivité.

Certes, la gendarmerie n’en est pas là en matière de recrutement, mais elle s’adapte. Nous nous orientons en effet vers un « e-recrutement », en digitalisant les processus d’inscription aux concours et examens, les épreuves et les corrections, pour gagner en fluidité et en rapidité de traitement et ainsi alléger les charges d’organisation. C’est aussi une première évaluation de la capacité d’un candidat à entrer dans un processus de recrutement digitalisé.

On parle désormais de parcours de formation et de logique de compétences. Comment cela se traduit-il ?

Notre Système d’information R.H., le SIRH Agorh@, est un atout fondamental, qui nous permet de disposer de données fiables et d’avoir une vision des compétences détenues ou à détenir. Il nous faut aujourd’hui franchir un gap technologique et optimiser les données en stock sur ce SIRH pour passer à une logique de gestion dynamique de ces données. La société évolue rapidement et la révolution numérique, largement engagée, va impacter massivement tous les métiers. Le gendarme ne sera pas épargné et devra évoluer dans l’exercice de son métier, qu’il soit acteur de terrain ou cadre dirigeant. L’intelligence augmentée et l’intelligence artificielle nous ouvrent des perspectives très prometteuses. L’objectif est d’être en mesure d’anticiper les besoins et d’adapter nos outils de formation sur le temps court, de 3 à 5 ans, pour les formations les plus évolutives, et surtout de s’inscrire dans le temps long pour la construction et la stratification des compétences dont les individus auront besoin tout au long de leur carrière.

Nous ne devons plus raisonner à partir de la notion de « métier », mais à partir de la notion de « compétences », pour agir de manière agile et prospective dans l’évaluation des potentiels et dans la construction de parcours professionnels individualisés. Par exemple, pour enrichir la diversité des compétences dont la gendarmerie aura besoin demain pour répondre aux défis qui l’attendent, nous avons complètement réformé, l’an dernier, l’enseignement supérieur du 2e niveau. Sur les 70 officiers lauréats de ce concours, trente suivent actuellement le cursus de l’école de guerre, tandis que les autres sont engagés dans des scolarités alternatives de haut niveau, comme l’ENA, HEC Paris, Sciences Po Paris, l’École de l’aviation civile, etc.

Aujourd’hui, nous devons aussi nous adapter aux aspirations des personnels. Les nouvelles générations expriment davantage le besoin d’avoir un horizon plus ouvert en termes de parcours de carrière. Tout en conservant des dominantes, il doit donc y avoir une porosité entre les métiers, à condition de remplir les conditions en termes de gestion et surtout d’en avoir acquis les compétences nécessaires. C’est tout l’enjeu de la Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) que nous allons mettre en œuvre et qui verra le développement d’Agorh@ Compétences.

Tous les personnels de la gendarmerie sont-ils concernés par ces efforts de formation ?

Se former, tout au long de sa carrière, quel que soit son statut ou son grade, est un impératif pour apporter à nos concitoyens la qualité de service qu’ils sont en droit d’attendre. En 2018, plus de 30 000 personnels ont suivi une formation initiale ou complémentaire, soit près du quart des effectifs globaux, réservistes compris. Tous les quatre ans, tout le monde, actifs comme réservistes, aura ainsi été intégré à une formation quelle qu’elle soit. L’entretien des savoir-faire fondamentaux est également un enjeu essentiel.

C’est le sens de la création du Centre national de formation à la sécurité publique de Dijon, où chaque gendarme APJ bénéficie d’un recyclage d’une semaine tous les cinq ans, afin de revoir les fondamentaux. Nous portons aussi l’effort sur la formation de nos cadres, officiers et gradés, pour leur donner les moyens d’exercer un commandement moderne et bienveillant. Nous réalisons par ailleurs chaque année de nombreuses formations d’expertises et de préparation à l’emploi. Enfin, nous organisons des stages d’accueil et de spécialisation au profit de nos 4 500 personnels civils.

La compétence des personnels, l’adhésion aux valeurs et la qualité de l’encadrement sont les facteurs déterminants pour que la gendarmerie soit, dans un contexte évolutif, de plus en plus exigeant, à la hauteur des attentes de la population.

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