La population doit être au cœur de toute notre action

  • Par la rédaction
  • Publié le 03 février 2020
© MAJ F. Balsamo

Nouveau visage de la gendarmerie, adaptation aux évolutions sociétales, poursuite de la transition numérique, importance de l’apprentissage du métier, mais aussi et surtout de l’identité de gendarme… Le général d’armée Christian Rodriguez, directeur général de la gendarmerie nationale, livre ses attentes et sa vision d’avenir en matière de ressources humaines et de formation.

Comment décririez-vous aujourd’hui le visage de la gendarmerie?

Je voudrais tout simplement commencer par dire que, malgré un métier difficile, le visage de la gendarmerie est un visage affable et rassurant, parce que l’Institution est solide et continue d’aller de l’avant. Cela, nous le devons en grande partie à l’excellent travail réalisé ces dernières années par le général Favier et le général Lizurey. Comme eux, notamment, je conçois la gendarmerie comme une force profondément républicaine, proche des gens, qui a la capacité d’offrir 130 000 visages au service quotidien de nos concitoyens. C’est notre plus grand atout et notre principale richesse. Le visage de la gendarmerie, c’est donc celui des femmes et des hommes qui sont au contact de la population et qui la protègent. C’est un visage aimé des Français parce qu’il est fait de dévouement et de respect d’autrui. Je m’inscris dans cet héritage.

Le général Lizurey n’a eu de cesse également de défendre et de promouvoir le modèle de la gendarmerie, veillant à intégrer et à additionner toutes les compétences, sans réflexe identitaire contre-productif. Je maintiendrai cette voie, car non seulement elle est tout à notre honneur, mais elle nous est, surtout, des plus utiles. Il y a de tous les âges en gendarmerie, de toutes les catégories sociales, de tous les statuts, civils et militaires, des hommes, des femmes, de plus en plus de femmes, et de jeunes, qui veulent nous rejoindre. Les chiffres croissants des inscriptions à nos concours sont notamment très explicites. Par exemple, se sont présentés cette année au concours sous-officiers 4 000 candidats de plus qu’en 2012. C’est un très bon signal sur l’image et le visage que renvoie la gendarmerie ! De même, l’apport des personnels civils n’est plus à démontrer ; tout le monde dans la maison l’a non seulement désormais accepté, mais constaté. Enfin, je vous renvoie à l’enthousiasme de nos réservistes, opérationnels comme citoyens, qui est une autre illustration de la pertinence de ce modèle d’ouverture. Non seulement leur renfort est précieux, mais ils nous permettent de mettre le doigt sur d’autres idées et de progresser. Il faut absolument continuer à les associer de façon croissante. Tout seul un D.G., comme tout chef, n’est rien. J’ai besoin de vous et j’ai besoin de vous tous.

Je rappelle également que l’ascenseur social en gendarmerie, dès lorsque l’engagement et le travail sont au rendez-vous, est consubstantiel à notre modèle et fonctionne très bien. C’est une chance et une clé d’attractivité à préserver absolument. Dans un pays où le blocage de l’ascenseur social reste un sujet majeur, la gendarmerie reste et doit se penser comme une force qui donne sa chance à tous, comme une force qui accompagne ses personnels et récompense leurs mérites. Je suis heureux et fier de compter parmi mes plus proches collaborateurs des généraux, hommes et femmes, qui ont commencé leur carrière comme gendarme. Et ce ne sont pas des exceptions.

La société, les technologies, la délinquance, les missions sont en constante évolution. Concrètement, qu’attendez-vous des personnels de la gendarmerie, en termes de savoir-faire comme de savoir-être ?

Il y a une règle simple : la population doit être au cœur de toute notre action. Il faut sans cesse se demander ce que le gendarme peut faire pour la population. « Pour la population, par le gendarme », cela peut et doit être notre mot d’ordre permanent.

S’agissant de vos savoir-faire je n’ai aucune inquiétude, dès lors que vous réactualisez en permanence vos connaissances pour vérifier leur intérêt, et dès lors que vous poursuivrez sans cesse votre effort de formation. J’ai en particulier un conseil – davantage qu’un conseil même – à donner à chacune et chacun : vous devrez vous pencher, tous, sur ce que permet le numérique. Il y a toujours, à toute époque, des passages obligés dans une carrière. La connaissance des outils numériques est ce passage obligé aujourd’hui. Je ne vous demande pas d’être tous des geeks, d’être des spécialistes, en revanche je vous demande de connaître, tous, les possibilités qu’offre déjà le numérique, qu’il offrira encore plus demain, pour être utile, dans l’exercice de notre métier, à la population.

S’agissant des savoir-être, ils sont évidemment décisifs. En toutes circonstances, soyons disponibles, humains, exemplaires. N’oubliez jamais que la confiance que la population place dans ses gendarmes ne fait et ne fera qu’accroître notre légitimité et notre force. C’est même la condition de notre autorité et de notre capacité à nourrir – j’y apporte beaucoup d’importance – le lien social, la cohésion nationale, l’esprit républicain. Le gendarme n’a pas vocation à devenir un super-assistant social, mais il se trouve qu’il est un formidable défenseur, un acteur concret, quotidien, du lien social, celui-là même, malheureusement, qui se distend et est ainsi à l’origine de nombre des crises contemporaines. C’est donc là une autre mission extrêmement noble que le gendarme a dans les mains, mais qui, j’insiste, ne peut se faire que s’il bénéficie de la confiance de la population. J’ajoute que cette attention aux savoir être est d’autant plus indispensable que les défis que nous devons relever (missions d’ordre public de plus en plus fréquentes et difficiles, durcissement des conditions d’engagement, etc.) constituent désormais des tests permanents. Soyons donc fiers et sûrs de nos valeurs, de nos méthodes de commandement et de nos objectifs. Servir la population, voilà, je le répète, le sens de notre action et de notre engagement. Si le gendarme, quel que soit son grade, par ses actes ou simplement par son comportement, s’écarte de ces valeurs, il échouera. Si au contraire il les incarne, il n’en trouvera que plus de sens à son travail, qui n’en sera que plus reconnu par tous.

Comment l’Institution adapte t-elle sa politique R.H. à ces multiples dimensions et aux évolutions de la société ?

L’une de mes grandes préoccupations est que nos gendarmes soient bien dans leur métier, bien dans leur uniforme, bien dans leur peau. Nous le leur devons, le quotidien de ce métier est suffisamment exigeant comme cela. Il y a notamment quelque chose d’essentiel : je veux que chacun ait la liberté de co-construire avec le gestionnaire sa propre carrière, d’en être acteur. Chacun doit avoir accès aux outils et aux données qui lui permettent d’imaginer son propre développement de carrière, de tracer des perspectives, d’imaginer des voies. Sur ce point, l’institution a considérablement progressé pour les sous-officiers. Au regard de la façon dont nous procédions il y a vingt ans, c’est un océan qui a été franchi, même s’il reste du chemin à parcourir. Il faut désormais autant progresser pour les officiers.

Socle de la maison gendarmerie, la formation a également beaucoup évolué et continue de le faire pour s’adapter aux nouveaux besoins. Quels sont selon vous ses points forts et ce vers quoi elle doit tendre ?

Là encore, tout le travail mis en place pour développer notamment l’apprentissage du contact avec la population et l’aisance numérique des gendarmes sera poursuivi. De la même façon, dans une institution où chaque militaire peut être amené à commander, l’enseignement du commandement éclairé, agile et bienveillant sera conforté. Il encourage l’autonomie, l’intelligence de situation, la prise de risque pour essayer de nouveaux concepts, et son corollaire, l’acceptation de l’échec. Ce n’est pas d’avoir échoué qui est mal, c’est de ne rien avoir tenté pour trouver une solution face à une situation de blocage.

Mais la formation n’est pas uniquement une question de contenus pédagogiques, c’est d’abord et avant tout, vous avez raison, le premier socle qui nous façonne au sein de l’Institution. Cela renvoie à la cohésion qui fait notre force, ce socle de valeurs et d’engagement lié à notre statut qui se noue à l’école et se forge plus fortement encore ensuite sur le terrain. Cette relation particulière qui existe entre nous, quel que soit notre grade car nous avons tous connu les uns à côté des autres, ensemble, les mêmes difficiles réalités du terrain, c’est la richesse de la maison. Il faut la préserver.

Je souhaite, en outre, que l’on sensibilise tous nos gendarmes, dès la formation pourquoi pas, mais aussi au quotidien dans nos unités, à deux questions.

La première est la suivante : comment, en service, peut-on consommer notre temps toujours plus utilement, c’est-à-dire au service concret de la population ? Il y a toujours des marges pour s’améliorer, pour faire mieux, pour gagner du temps. Gagner du temps doit être pour tout gendarme un objectif à part entière, car le métier peut trop facilement nous conduire à nous auto-consommer, tout le monde le sait, dans des procédures ou des organisations internes aussi invraisemblables qu’inutiles. Tous les moyens qui peuvent nous permettre de gagner du temps pour le consacrer moins aux habitudes administratives et davantage aux habitants de nos circonscriptions doivent toujours être examinés. C’est une ambition de la maison depuis plusieurs années maintenant et elle doit passer désormais définitivement au stade du réflexe. Ce n’est pas simple et c’est un effort auquel je prends toute ma part, car les textes et les procédures de la DGGN sont encore trop souvent lourds et complexes, et nous devons aussi convaincre nos partenaires que la simplification est un utile et indispensable combat.

Enfin, je veux vous répéter, comme je le fais quand je viens à votre contact, de ne pas oublier de prendre soin de vous. C’est quelque chose que l’on ne dit pas assez, mais, encore une fois, ce à quoi vous êtes confrontés au quotidien est suffisamment dur pour que vous en ayez le droit et même le devoir. Prenez soin de vous entre camarades, prenez soin de vous avec vos familles, prenez soin de vous tout court, vous n’en serez que de meilleurs gendarmes pour nos concitoyens. Je n’ai aucun d’état d’âme à dire cela, car je vous fais confiance, je sais que je le dis à des hommes et des femmes qui partagent un remarquable sens de l’engagement. Je ne le dis donc certainement pas pour que chacun en fasse moins, mais parce que j’ai besoin, la mission a besoin, la population a besoin, de votre calme, de votre hauteur de vue, de votre professionnalisme à toute épreuve, en un mot de votre lucidité. Prenez soin de vous par conséquent, en vertu de principes militaires fondamentaux, pour être prêts, et prêts s’il le faut à tenir. On ne sait jamais ce que seront les missions du lendemain…

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