Cambriolages sériels : une opération judiciaire franco-albanaise met fin aux activités d’un groupe organisé

  • Par Maud Protat-Koffler
  • Publié le 16 mai 2019
© S.R. de Metz

Une opération simultanée en France et en Albanie, conduite le 23 avril dernier, par les enquêteurs de l’office central de lutte contre la délinquance itinérante et de la section de recherches de Metz, a permis l’arrestation de sept ressortissants albanais, soupçonnés d’avoir commis une série de cambriolages d’habitations.

Entre 2017 et 2018, la Lorraine est touchée par une vague de cambriolages, plus particulièrement dans le département de la Moselle et dans le nord de la Meurthe-et-Moselle. Durant cette période, plusieurs équipes de cambrioleurs albanais et kosovars sont interpellées en flagrant délit par la gendarmerie et la police nationales. La politique pénale ferme menée par le parquet général de Metz et les procureurs de la République, conduit à des condamnations en comparution immédiate, souvent comprises entre un et trois ans de prison ferme.

Mais l’enquête ne s’arrête pas là et aboutit, le 23 avril dernier, à l’interpellation d’une bande organisée de sept ressortissants albanais impliqués dans près de 70 cambriolages, commis entre septembre et décembre 2018.

Première opération franco-albanaise dans la lutte contre les cambriolages sériels

Au printemps 2018, avec le soutien du Parquet de la Juridiction inter-régionale spécialisée (JIRS) de Nancy, une enquête est ouverte, visant à identifier et à neutraliser les structures de soutien des équipes de cambrioleurs déjà interpellées ou toujours actives.

La cellule d’enquête nationale « OCLDI Aquila Grand Est » est créée le 31 mai, avec six enquêteurs issus du détachement de Nancy de l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI), de la Section de recherches (S.R.) de Metz et des Groupements de gendarmerie départementale (GGD) de Metz et de Nancy, et codirigés par la section de recherches (S.R.) de Metz et le détachement OCLDI.

Le groupe interministériel de recherches (GIR) de Lorraine et la sûreté départementale de la police de Metz sont également co-saisis et partagent l'information criminelle.

Jusqu’ici, les enquêteurs de la S.R. de Metz et du détachement de l’OCLDI de Nancy sont intervenus en appui de leurs camarades des groupements de Moselle et Meurthe-et-Moselle. Ils acquièrent progressivement la conviction que les équipes interpellées en flagrant délit ne pouvaient s’être installées dans le secteur de Metz et de Thionville sans être aidées localement par des complices. L’ampleur du phénomène criminel oriente donc les enquêteurs vers l’existence d’un groupe organisé.

À la même période, pour faciliter les investigations, un officier de liaison albanais est affecté au sein de l’OCLDI, à Arcueil.

Le clan K en appui d'équipes de cambrioleurs

    À compter de l’été 2018, les enquêteurs orientent leurs investigations sur un clan familial, la famille K., installée au sud de Thionville. Moyennant des loyers et une partie des butins, elle met à disposition des criminels des logements loués à son nom et fournit des véhicules, dont certains volés en Belgique.

Les surveillances effectuées permettent successivement d’identifier deux équipes de cambrioleurs qui vont et viennent entre la France et l’Albanie depuis plusieurs années, et commettent en France des cambriolages de résidences principales, notamment en fin de journée, à la nuit tombée. Des enquêtes sont également ouvertes à leur encontre dans plusieurs autres pays européens, comme la Belgique, l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne, où l’un des membres a laissé son ADN sur une centaine de lieux de cambriolages commis en 2017.

Par l’intermédiaire de l’officier de liaison albanais détaché au sein de l’OCLDI, des échanges se mettent en place entre la cellule française Aquila et la task-force « Anti-Faucons », en charge de lutter contre la criminalité organisée itinérante en Albanie.

Une information judiciaire est notamment ouverte pour vols en bande organisée et recel en septembre 2018. Un juge d’instruction de la JIRS de Nancy est alors désigné.

© S.R. de Metz

Des opérations menées simultanément

Après avoir réuni les éléments de preuve suffisants pour mettre en cause le clan K. et les équipes de voleurs identifiées, le principe d’une interpellation rapide est arrêté. Mais les équipes de voleurs, parties précipitamment avant les fêtes, tardent à revenir en France.

Les autorités albanaises sont donc sollicitées, par l’intermédiaire de l’officier de liaison albanais au sein de l’OCLDI et de l’Attaché de sécurité intérieure français en Albanie.

Le Parquet en charge des crimes graves en Albanie et la task-force anti-faucons se mobilisent, en exécution d’une commission rogatoire internationale du juge d’instruction français, pour localiser les voleurs qui s’y croient à l’abri et permettre leur interpellation simultanée avec les membres du clan K.

Mardi 23 avril dernier, sept personnes sont interpellées : quatre en France, où une dizaine de perquisitions sont conduites par une quarantaine de gendarmes et de policiers, et trois en Albanie, où une cinquantaine de policiers albanais est mobilisée. Une huitième personne est placée en garde à vue le 25 avril, en France, où une dizaine de témoins est également entendue.

Les perquisitions permettent de retrouver, en Albanie notamment, plusieurs objets volés en Lorraine, dont des bijoux saisis à titre conservatoire en vue d’être présentés aux victimes concernées.

Cinq personnes placées en détention provisoire, deux sous contrôle judiciaire

À l’issue de leur audition, les trois personnes arrêtées en Albanie sont, sur décision du tribunal de lutte contre le crime grave de Tirana, placées en détention provisoire le 26 avril.

Parmi les cinq personnes placées en garde à vue en France, le chef du clan, l’un de ses fils, la femme de ce dernier et un proche de la famille sont également présentés au juge mandant à Nancy et mis en examen. Le père et le fils sont placés en détention provisoire tandis que les deux autres sont placés sous contrôle judiciaire par le juge de la liberté et de la détention.

L’enquête se poursuit afin de compléter les investigations. Une partie des faits sera dénoncée aux autorités albanaises afin que les voleurs, qui ne pourront pas être extradés vers la France en raison de leur nationalité, puissent être jugés dans leur pays d’origine.

Le Procureur des crimes graves albanais a étendu ses investigations au blanchiment et a annoncé son intention de procéder à des saisies immobilières en Albanie.

Une enquête stratégique et structurée

Cette première opération simultanée en la France et l’Albanie dans le domaine des cambriolages sériels est le résultat d’une enquête structurée, qui a permis de développer la coopération entre les deux pays.

Elle est également le fruit de l'association d'unités de sécurité intérieure françaises (S.R. Metz, GGD 57, GGD 54, OCLDI pour la gendarmerie et DDSP 57 / SD 57, GIR Lorraine pour la police) et albanaises (task force "Anti-Faucons"), mais aussi celui d'une stratégie judiciaire partagée entre la JIRS de Nancy et le Parquet en charge des crimes graves en Albanie.

Conduite dans le cadre d'une information judiciaire de la JIRS de Nancy, cette action judiciaire est par ailleurs inscrite dans le cadre du programme européen SPECTRE, avec le soutien d'Europol.

L’interpellation en Albanie des équipes de voleurs met fin au sentiment d’impunité des criminels croyant trouver dans leur pays d’origine un refuge entre deux séquences de cambriolages commis en France ou d’autres pays européens.

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