Coopération européenne contre le trafic international de civelles

  • Par Commandant Céline Morin
  • Publié le 05 mars 2020
La civelle ne paie pas de mine, mais elle suscite bien des convoitises.
© OCLAESP

Les civelles, pourtant protégées depuis 2009 par la Convention de Washington, sont au cœur d’un commerce illégal d’ampleur, principalement à destination de l’Asie, aussi juteux que le trafic de stupéfiants. Pour contrer ce phénomène menaçant la biodiversité, Europol a initié, depuis 2015, l’opération Lake. L’édition 2020 s’est déroulée du 17 février au 2 mars, dans quinze pays européens, dont la France, où tous les acteurs concernés se sont mobilisés sous l’impulsion de l’OCLAESP.

Si les civelles ou encore pibales, autre nom des alevins d’anguilles européennes (anguilla anguilla), sont prisées des gastronomes français, leur chair à l’âge adulte est particulièrement recherchée sur le marché asiatique, où elle peut se négocier jusqu’à 8 000 euros le kg.

L’anguille locale, ou plus exactement japonaise (anguilla japonica), ayant disparu, du fait de l’absence de mesures de protection, le marché asiatique s’est donc tourné vers l’anguille européenne, qui s’est de fait retrouvée la proie des braconniers. Un véritable trafic organisé portant sur l’exportation de civelles vivantes a ainsi vu le jour afin d’alimenter des piscicultures en Asie.

Un phénomène difficile à chiffrer

Face à ces dérives et à la menace d’extinction de l’espèce du fait de sa surexploitation, l’anguilla anguilla est protégée par la Convention de Washington depuis 2009 et sa pêche est de fait très encadrée par la réglementation des pêches communautaire et nationale, avec notamment l’instauration de quotas.

Interdites d’importation et d’exportation, elles peuvent toutefois être pêchées et transportées sur les territoires français et européens sur présentation d’un justificatif.

Ces mesures n’ont toutefois pas découragé les groupes criminels, attirés par cette filière présentant moins de risques que le trafic de stupéfiants pour un rendement financier équivalent.

L’ampleur du phénomène est difficile à chiffrer avec exactitude, mais les dossiers traités par les différents acteurs impliqués permettent d’en avoir une bonne estimation.

Ainsi, récemment, l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (OCLAESP) a pu évaluer le trafic d’un réseau à 1,530 tonne de civelles sur une année et pour le seul territoire français. Avec un prix de vente minimum de 1 000 euros le kg de civelles en Chine, le chiffre d’affaires de ce réseau est estimé à près de 1 300 000 euros.

Selon Europol et des entités telles que le Service d'enquêtes judiciaires des finances, les réseaux comme celui-ci, indépendants les uns des autres, sont nombreux. Si on ne connaît pas leur nombre exact, il est plus que certain que tous présentent une activité aussi intense.

Europol au secours des anguilles européennes

Afin de mettre un terme à ce commerce illicite, l’agence européenne Europol a initié depuis 2015 une opération baptisée LAKE, impliquant de nombreux pays de l’Union européenne.

Cette année, pour la première fois dans le cadre de ce dispositif, une semaine de contrôles coordonnés a été conduite du 17 février au 2 mars, dans quinze pays, essentiellement des États membres de l’Union européenne, mais également des pays tiers tels que la Géorgie.

L’objectif était bien évidemment de relever des infractions, mais également de favoriser la remontée et l’échange des informations entre administrations, notamment en vue d’encourager l’ouverture d’enquêtes judiciaires permettant le démantèlement des groupes criminels impliqués.

Ce type d’opération permet également de mieux connaître les modes opératoires, les techniques et les itinéraires utilisés par les trafiquants.

Sous l’impulsion de l’OCLAESP, les directions départementales des territoires et de la mer, du Morbihan jusqu’aux Pyrénées Atlantiques, l’Office français de la biodiversité, les brigades de surveillance du littoral de la gendarmerie maritime, les brigades nautiques et les brigades territoriales de la gendarmerie et enfin les services des Douanes ont conduit des actions ciblées dans des lieux stratégiques.

Sous l’impulsion de l’OCLAESP, les directions départementales des territoires et de la mer, du Morbihan jusqu’aux Pyrénées Atlantiques, l’Office français de la biodiversité, les brigades de surveillance du littoral de la gendarmerie maritime, les brigades nautiques et les brigades territoriales de la gendarmerie et enfin les services des Douanes ont conduit des actions ciblées dans des lieux stratégiques.

© OCLAESP

Coopération interservices sur le sol français

En France, les contrôles ont été conduits du 17 au 24 février, sous la coordination des Directions Interrégionales de la Mer Nord Atlantique Manche Ouest et Sud Atlantique ainsi que de l’Office Français de la Biodiversité, mobilisant l’ensemble des acteurs concernés.

Sous l’impulsion de l’OCLAESP, les directions départementales des territoires et de la mer, du Morbihan jusqu’aux Pyrénées Atlantiques, l’Office français de la biodiversité, les brigades de surveillance du littoral de la gendarmerie maritime, les brigades nautiques et les brigades territoriales de la gendarmerie et enfin les services des Douanes ont mené des actions ciblées dans des lieux stratégiques.

13 interpellations et 70 kg de civelles remises à l’eau

Sur les zones de pêche, dans les ports de débarquement et sur les axes de communication, les contrôles ont permis de vérifier le respect de la réglementation par les pêcheurs professionnels et les mareyeurs mais aussi d’interpeller quelques braconniers.

Au cours de la trentaine de contrôles effectués, 14 irrégularités ont ainsi été constatées, 13 individus ont été interpellés et près de 70 kg de civelles saisies ont pu être remises en liberté.

Cette opération atteste de la réalité du commerce illégal dont sont victimes les civelles et illustre la nécessité d’un travail coordonné des services de l’État pour contrer efficacement ce phénomène portant atteinte à l’environnement.

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