Marseille : quatre braconniers condamnés pour préjudice écologique

  • Par la capitaine Sophie Bernard
  • Publié le 12 mars 2020
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Pour avoir pêché illégalement 4,6 tonnes de poissons dans des zones protégées, quatre braconniers, interpellés par la gendarmerie maritime, ont été condamnés à verser 385 000 euros de dommages et intérêts au Parc national des Calanques, au titre du préjudice écologique causé à l’écosystème. Cette décision historique pourrait faire jurisprudence.

Ils pillaient les réserves marines du Parc national des Calanques et revendaient le produit de leur pêche à moindre coût aux commerçants du coin, menaçant ainsi la biodiversité locale et laissant aux amateurs de bouillabaisse un goût amer…

Une pêche loin d’être miraculeuse

Quatre pêcheurs sous-marins, passionnés d’apnée, ont écumé les zones de non-prélèvement des calanques de Marseille durant plusieurs années. Chassant au harpon, de nuit, ils auraient ainsi braconné au total 4,6 tonnes de poissons (dont des espèces protégées comme les mérous), 322 kg de poulpes et 16 800 douzaines d’oursins. Une activité illégale lucrative puisque le bénéfice pouvait s’élever jusqu’à 2 000 euros par jour.

Après deux ans d’enquête faisant suite à l’obtention de renseignements, les quatre hommes ont été interpellés en flagrant délit, en juin 2017, par les militaires de la brigade de recherches de la gendarmerie maritime Méditerranée et de la brigade de surveillance du littoral de Marseille.

gendarmerie maritime
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Ces unités ont notamment pour mission de lutter contre les atteintes à l’environnement, dont fait partie le braconnage.

En juillet 2018, les individus ont été condamnés, sur le plan pénal, à des peines allant de 15 à 18 mois de prison avec sursis. Mais c’était sans compter l’atteinte causée à ce patrimoine naturel d’exception.

Évaluer l’inestimable

Au cours de l’audience, qui s’est tenue vendredi 6 mars, il s’agissait cette fois, pour le juge civil, de déterminer si un préjudice écologique pouvait être retenu et à quelle hauteur. Cette notion récente, définie dans la loi pour la reconquête de la biodiversité de 2016, n’était apparue jusqu’ici que dans deux décisions juridiques et n’avait encore jamais été utilisée pour un dossier d’une telle ampleur.

Afin de tenter de chiffrer le préjudice environnemental, le Parc national des Calanques a adopté une méthode méticuleuse exceptionnelle, faisant appel à des scientifiques et à des économistes. S’appuyant sur cette évaluation et sur des éléments de l’enquête, les représentants du Parc ont réclamé 450 000 euros d’indemnisation.

« La nature a une valeur »

Le TGI de Marseille a finalement condamné les quatre braconniers à une amende de 385 000 euros pour « le préjudice écologique indéniable causé à l’écosystème ». Le président du tribunal, Pierre Jeanjean, a insisté sur le fait que ce montant « ne représente que deux fois le prix au marché des espèces détruites », ajoutant « on n'est pas là au prix dans la balance du poissonnier mais à la valeur de ces poissons dans l'écosystème ! »

Cette somme sera directement affectée à la réparation et à la protection de l’environnement impacté. Les pêcheurs devront également verser 20 000 euros pour « préjudice d’atteinte à la mission » du Parc et 15 000 euros pour l’atteinte à son image et à sa réputation.

Bien qu’ils aient bénéficié de cette pêche, le tribunal a jugé irrecevable la demande de « solidarité » des braconniers à l’égard des écaillers, poissonniers et restaurateurs locaux. Néanmoins, cinq commerçants ont été condamnés à 3 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral.

Cette décision, sans précédent, est chargée de sens et pourrait ouvrir la voie à d’autres condamnations dans le cadre des atteintes à l’environnement. « Ce jugement démontre que la nature a une valeur et que ceux qui s’y attaquent seront punis », s’est félicité, Didier Réault, le président du conseil d’administration du Parc national des Calanques.

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