Un militant néonazi jugé pour apologie de crimes de guerre en Moselle

  • Par Antoine Faure
  • Publié le 28 février 2020
Photo d'illustration
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© MI/DICOM/D.MENDIBOURE

Saisis en 2018, après la découverte d’une stèle érigée à la gloire d’une division SS, le groupement de gendarmerie départementale de Moselle et l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité les génocides et les crimes de guerre (OCLCH) ont enquêté conjointement sur cette affaire. Le jugement a eu lieu le 24 février. Verdict attendu le 23 mars.

Au début du mois de janvier 2018, un promeneur remarque, sur un terrain privé, à proximité d’un chemin communal de Volmunster, en Moselle, un bloc de béton d’environ 80 cm de haut, sur lequel on peut lire une inscription en allemand. La phrase fait référence à la 17e Division Panzer SS. Sa devise, « En avant, on y va, à travers », ainsi qu’une croix de fer figurent également sur la stèle.

Le marcheur signale le fait aux gendarmes, qui font remonter l’information à l’autorité judiciaire. Le procureur de la République de Sarreguemines, Jean-Luc Jaeg, décide immédiatement d’ouvrir une enquête préliminaire et de faire enlever la stèle, en raison des risques de troubles à l’ordre public.

Le 24 janvier 2018, le parquet requiert l’ouverture d’une enquête judiciaire sur commission rogatoire d’un juge d’instruction. Elle est confiée au juge Emmanuel Rodriguez, qui saisit deux services d’enquête : le groupement de gendarmerie départementale de Moselle et l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité, les génocides et les crimes de guerre (OCLCH).

« Cette affaire relevait de notre double mandat, qui est d’enquêter sur les crimes internationaux les plus graves, ainsi que sur les infractions commises à l’encontre des personnes en raison de leur prétendue race, leur religion, leur ethnie ou leur orientation sexuelle, explique le chef d’escadron (CEN) Nicolas Le Coz, chef d'office en second de l'OCLCH. Notre rôle, en lien avec la cellule nationale de lutte contre les crimes de haine (ASTREE), créée l’an dernier et rattachée à notre service, était d’éclairer le juge d’instruction sur le fait de savoir en quoi, selon nous, l’infraction d’apologie de crimes de guerre était bien constituée. »

La jurisprudence de Nuremberg

La première interrogation concernait le fait que la stèle se trouvait sur un terrain privé. Aucun problème en l’espèce. L’apologie est publique à partir du moment où la stèle est visible du public, ce qui était le cas. Il a ensuite fallu établir que faire l’apologie d’une division SS revenait à faire l’apologie de crimes de guerre. « La jurisprudence est claire, estime Nicolas Le Coz. Présenter des criminels sous un jour favorable revient à faire l’apologie de leurs crimes. En l’occurrence, l’inscription de la stèle, qui signifiait « Gloire et Honneur à la 17e Division Panzer SS », est clairement apologétique et a pour but d’inciter ceux qui lisent le texte à porter un jugement favorable sur cette division. »

Mais la question la plus épineuse restait de savoir si ces SS avaient bien commis des crimes de guerre en France. Ils sont suspectés d’avoir abattu 124 habitants du village de Maillé (Indre-et-Loire) le 25 août 1944, mais cela suscite parfois des débats entre historiens. « C’est précisément là que notre intervention a été importante, note le CEN Le Coz. Nous avons consulté le jugement du tribunal militaire international de Nuremberg, qui dit clairement qu’il n’y a aucun endroit en Europe où les SS n’ont pas commis de crimes de guerre. Ce jugement, intégré dans le droit international, fait partie de la jurisprudence du droit français. »

Un groupuscule de suprémacistes

L’autre apport de l’Office a été d’enquêter sur l’auteur des faits, un Allemand de 36 ans, en étroite collaboration avec les gendarmes de la brigade de recherches de Sarreguemines, qui ont notamment perquisitionné le domicile de l’homme en Allemagne. « Nous avons apporté au juge notre expertise au sujet du groupuscule néonazi Hammerskins, dont il fait partie. Il s’agit d’un groupe de suprémacistes blancs né aux États-Unis et très implanté en Europe, notamment en Espagne et au Portugal, où ses membres ont commis des violences contre les personnes. »

Mis en examen à l’été 2018, le militant d’extrême-droite a été jugé le 24 février dernier. Le parquet a requis à son encontre 18 mois de prison, dont 9 avec sursis. Le tribunal correctionnel rendra sa décision le 23 mars.

Pour Nicolas Le Coz, « cette enquête est assez exemplaire d’un travail mené conjointement avec les gendarmes de la brigade de recherches, le juge d’instruction, qui a accompli un travail remarquable, et le parquet. »

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