Gendarmes au féminin : le regard de trois pionnières

  • Par la capitaine Gaëlle Pupin et Angélina Gagneraud
  • Publié le 30 janvier 2018
Les 154 premières femmes sous-officiers de la 79e promotion posent, avec leurs instructeurs au premier rang.
© D.R.

Véronique Billottet, Maryline Dubarry et Isabelle Riquet sont des volontaires de la première heure. Issues de la 79e promotion « Sainte Geneviève » à Montluçon, elles font partie des 154 premières femmes à suivre la formation pour devenir sous-officier. Depuis leur sortie d’école en 1984, que sont devenues ces « pionnières » et quel regard portent-elles sur la gendarmerie d’aujourd’hui ?

Être gendarme en 1984, une vocation avant tout

« Fille, petite-fille et arrière-petite-fille de gendarme », Isabelle Riquet regrettait de ne pouvoir servir cette arme que par le biais d’une carrière de soutien. « J’étais très attirée par le monde militaire sans pour autant vouloir exercer le seul métier des armes, celui du soldat combattant. » Ce goût pour la militarité est partagé par Maryline Dubarry qui effectue son service national en gendarmerie avant d’intégrer les emplois administratifs en état-major de l’Armée, toujours en gendarmerie.

« J’ai baigné depuis toute petite dans ce métier ; mon père était gendarme. » Comme lui et les sous-officiers qu’elle rencontre au cours de cette première affectation, elle voulait être « sur le terrain ». À l’instar de ses camarades, Véronique Billottet est avant tout attirée par le cœur du métier : « être au service des citoyens ». Trois femmes voulant vivre pleinement au quotidien les valeurs du monde militaire, mais au contact de la population.

Premiers pas en école : cohésion et solidarité

Intégrant la première et seule compagnie exclusivement féminine, les profils des nouvelles stagiaires sont variés : certaines sortent des études, tandis que d’autres sont mariées, voire ont déjà des enfants… Mais toutes sont des femmes de caractère ! « C’était une première pour tout le monde, tant pour nous que pour les cadres », précise Véronique Billottet. Un vrai challenge collectif. « Ni nous, ni nos chefs n’avions l’intention de nous priver de cette formidable opportunité de prouver que la femme avait bien sa place dans l’Institution », ajoute Isabelle Riquet.

L’obstacle tant redouté de la fosse.

L’obstacle tant redouté de la fosse.

© D.R.

Une formation éprouvante physiquement, à l’image du parcours du combattant : « Nous n’avions aucun dispositif d’adaptation pour franchir les obstacles. La technique, nous l’avons acquise au prix d’ecchymoses aux bras et aux hanches ! » Seul moyen d’y arriver : l’esprit de corps. « Sans aucune rivalité, notre objectif était de terminer toutes ensemble la formation, explique Maryline Dubarry. Entre nous existait une forte cohésion. Entraide et solidarité n’étaient pas de vains mots. Nous étions toutes fières d’être les pionnières ! »

Arrivée sur le terrain : une expérimentation couronnée de succès

Les affectations des premières femmes sous-officiers sont volontairement limitées aux grosses unités, en chef-lieu compagnie. « La phase expérimentale se poursuivait ainsi sur le terrain mais en restant suffisamment encadrée et sous contrôle, souligne Isabelle Riquet. Je me suis parfois sentie “surprotégée” par mon commandant d’unité. » Impression confirmée par Maryline Dubarry : « Mon commandant de brigade avait demandé que tout le monde soit “poli” car “une femme arrivait”.

Mais je voulais apprendre le métier sans que personne ne change rien. Je voulais m’adapter à eux et pas l’inverse ! » Ainsi, les dernières réserves de leurs camarades masculins sont rapidement levées. « J’ai été immédiatement intégrée à l’équipe. Même travail, même rythme ! affirme Véronique Billottet. Il a toutefois fallu composer avec la méfiance des épouses… du moins au début. »

Mener sa carrière : tout est question de choix !

Une fois le corps des sous-officiers intégré, tout devient possible. De multiples opportunités s’offrent à elles. « J’ai participé à plusieurs expérimentations, explique Maryline Dubarry. J’ai occupé certaines fonctions que je n’aurais jamais imaginées ! Mixer les équipes de filature en section de recherches, ouvrir la première BPDJ d’outre-mer à l’île de la Réunion, intégrer le premier concours d’officier rang de l’EOGN, etc. Tout est question d’opportunités, de choix et de travail, si tant est qu’on en accepte les contraintes. » Principal défi pour un sous-officier féminin : concilier vies professionnelle et familiale.

Un sujet toujours d’actualité… « Mon conjoint travaillait dans la brigade voisine mais la gendarmerie nous a permis d’avoir un logement commun, ce qui a facilité la gestion des enfants au quotidien au regard notamment de l’organisation du service. À l’époque, pas de Q.L. et nous étions souvent rappelées la nuit. J’ai ensuite fait le choix d’un poste d’état-major afin de privilégier ma vie familiale », reconnaît Véronique Billottet.

Une décision également prise par Isabelle Riquet pendant quelques années, avant de se voir confier son premier poste de commandement, en tant que commandant de Cob. « J’ai savouré, quatre années durant, cette responsabilité, combinant opérationnel et management, qui a comblé toutes mes aspirations. » Après 33 ans de carrière, émaillés de choix différents, elles jettent un regard empreint de satisfaction et de fierté sur leurs parcours respectifs. « Si c’était à refaire, je ne changerais rien ! »

Regards croisés sur la place de la femme en gendarmerie aujourd’hui

« Les femmes en mobile ? Il leur sera peut-être difficile de concilier leur rythme d’emploi et leur vie familiale. Au final, elles rencontreront sûrement les mêmes difficultés que nous au début. Mais la gendarmerie s’adapte. Elle a avancé et avancera encore », estime Véronique Billottet. Au fil des années, les restrictions initiales se sont, en effet, effacées et continuent de l’être. « La complémentarité Homme/Femme constitue une richesse supplémentaire dans chaque facette de notre métier.

En outre, dans notre profession, nos revenus sont parfaitement identiques à ceux des hommes ; c’est une vraie chance », met en exergue Isabelle Riquet. Avant d’ajouter : « En tant que pionnières, nous revendiquions les mêmes charges, les mêmes fonctions mais nous insistions aussi sur le fait que nous avions, de fait, les mêmes devoirs. » Point de vue partagé par Maryline Dubarry qui conclut :

« Notre métier, on l’assume. Nous avons un devoir envers les citoyens et notamment les victimes. La disponibilité prime, nous avons signé pour ça ! »

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