Allô le 17?

  • Par le capitaine Eric Costa
  • Publié le 16 août 2018
Opérateurs du centre d’opérations et de renseignement de la gendarmerie de Perpignan.
© Sirpa gendarmerie - MAJ F. Balsamo

Plus qu’un organe centralisateur des appels d’urgence, les centres d’opérations et de renseignement de la gendarmerie sont le bras armé des commandants de groupement de gendarmerie départementale sur le plan du commandement opérationnel au quotidien. Aperçu de leurs missions au travers de celui de Perpignan (66).

Le Centre d’opérations et de renseignement de la gendarmerie (Corg) contribue à la continuité du service public de sécurité, en apportant la première réponse institutionnelle aux sollicitations des usagers. « Le Corg est le concentrateur de l’information et le point d’entrée des événements qui se produisent sur le ressort du département, depuis les interventions quotidiennes de faible gravité jusqu’aux événements les plus importants », précise le colonel Denis Nauret, commandant le Groupement de gendarmerie départementale (GGD) des Pyrénées-Orientales (66).

Répondant aux requérants qui composent le «17» et aux appels adressés aux unités élémentaires après 19 heures, les opérateurs du Corg évaluent la gravité des situations et sont en mesure de déclencher l’engagement des moyens du GGD, ainsi que leur montée en puissance. L’un des objectifs est de réduire les délais d’intervention, dont le maximum est fixé à trente minutes.

Un appui au commandement opérationnel

En fonction de la nature des événements, et dans un souci de réactivité, le chef de quart peut prendre la décision d’engager, si nécessaire, des effectifs et des moyens. Cela n’empêche pas les échelons déconcentrés, du niveau brigade ou compagnie, d’assurer la mise en œuvre des capacités opérationnelles de leur niveau.

Grâce au Corg, le commandant de groupement a un suivi de tous les événements se produisant dans son département. Depuis le centre, il peut ainsi concevoir sa manœuvre, opérer la montée en puissance des moyens engagés, voire assurer le commandement des opérations.

 

Grâce au Corg, le colonel Denis Nauret, commandant le groupement de gendarmerie départementale des Pyrénées-Orientales, a un suivi de tous les événements survenant dans le département.

© Sirpa gendarmerie - MAJ F. Balsamo

Des effectifs d’active et de réserve

« Le Corg des Pyrénées-Orientales est armé par quatorze sous-officiers pour la partie opérationnelle et trois militaires pour la partie renseignement, détaille le capitaine Joseph P., commandant le Corg 66. Habituellement, le quart est armé par deux personnels, parmi lesquels un chef de quart responsable de la gestion de l’événement. Les vendredi et samedi soirs, en période estivale ou à l’occasion de grands événements, l’effectif passe à trois, voire quatre opérateurs. Nous bénéficions souvent du renfort de réservistes opérationnels ». Afin de ne pas tomber dans une routine et favoriser la récupération physiologique, les opérateurs alternent entre des services diurnes et nocturnes, selon trois créneaux différents : 7h/13h, 13h/19h et 19h/7h. C’est durant le créneau nocturne que surviennent 40 % des interventions gérées par le Corg 66.

 

Lorsque l’activité du Corg66 est intense, à l’instar des veilles de week-end ou en période estivale, les effectifs peuvent monter jusqu’à quatre opérateurs, au lieu de deux en tant normal.

© Sirpa gendarmerie - MAJ F. Balsamo

De nombreuses qualités requises pour y servir

« Pour bien appréhender les situations, les militaires d’un Corg doivent posséder une riche expérience de la brigade, cœur du métier de gendarme. Une telle affectation nécessite aussi de posséder une grande intelligence de situation, une faculté d’analyse avérée et de savoir faire preuve de réactivité face au panel extrêmement large de cas pouvant se présenter. Il faut savoir gérer l’urgence et la multiplicité des appels téléphoniques. Il est aussi indispensable d’avoir le sens de l’écoute, du dialogue et une certaine autorité », ajoute le colonel. En prise directe avec la détresse sociale, les opérateurs doivent savoir user de psychologie, notamment lors des nombreux appels liés aux violences intrafamiliales. Ces derniers ont représenté 10 % des 26 950 interventions gérées par le Corg 66 en 2017, sur un total de 150 000 appels reçus. Toutes ces conditions font que ce type de poste n’est pas ouvert aux gendarmes adjoints volontaires.

Un lien maintenu avec le terrain

« J’ai été agréablement surprise de constater que même affectée dans un bureau, je n’ai pas perdu le côté opérationnel de la gendarmerie, bien au contraire. Ce n’est pas une mission de simple accueil téléphonique. Nous participons à l’intervention en appui des personnels engagés sur le terrain. En apportant les bons éléments aux premiers à marcher et en engageant les renforts et les moyens nécessaires selon notre analyse, notre réaction conditionne la réussite de l’intervention », explique l’adjudante Bénédicte G., chef de quart opérationnel.

 

Le capitaine Joseph P., commandant le Corg66, faisant un point de situation avec le chef de quart

© Sirpa Gend - Maj F. Balsamo

Mission renseignement

À la création des centres opérationnels de la gendarmerie, en 1990, la cellule renseignement était dissociée du centre opérationnel. Depuis le début 2006, elle en fait partie intégrante, assurant une veille opérationnelle continue, afin de déceler les situations susceptibles d’avoir des conséquences en matière d’ordre public. « Même si cette cellule est hiérarchiquement sous mes ordres, elle travaille en très étroite collaboration avec l’officier adjoint renseignement du GGD », précise le commandant du Corg.

Une professionnalisation indispensable

L’action des Corg repose techniquement sur l’emploi de la Base de données de sécurité publique (BDSP). Les sous-officiers nouvellement affectés suivent un stage de professionnalisation à Rosny-sous-Bois (93), au Centre national de formation au renseignement opérationnel (CNFRO) et au Centre national de formation aux systèmes d’information et de communication de la gendarmerie (CNFSICG).

 

Opératrice du Corg66 renseignant le tableau qui mentionne les patrouilles en service sur les différentes compagnies du groupement.

© Sirpa Gend - Maj F. Balsamo

« En plus de permettre une transmission réactive de l’information en direction des échelons subordonnés et supérieurs, BDSP propose un journal de conduite des opérations grâce auquel est assurée une traçabilité du traitement des événements. Associée à cette base, la géolocalisation de tous les véhicules en service donne un visuel direct sur les effectifs engagés sur le terrain. Cela favorise l’engagement judicieux de la patrouille la plus proche de l’événement, quelle que soit son unité d’appartenance. Enfin, pour optimiser la réponse opérationnelle et la transmission des informations sur toute la circonscription, nos opérateurs sont rodés à l’usage de la radio. La culture de la conférence départementale est bien ancrée dans le GGD 66 », poursuit le colonel Nauret.

Une maîtrise parfaite de cette base, et plus particulièrement de ses modules Ops et Rens, est donc indispensable. Pour les nouvelles recrues, une formation continue est assurée au sein de l’unité grâce à la mise en place d’un tutorat.

Cette professionnalisation ne fait pas pour autant de l’emploi en Corg une spécialité. C’est pourquoi l’avancement ne peut se faire que dans le cadre général : soit avec l’obtention de la qualification d’officier de police judiciaire, soit via l’Avancement semi-automatique (Asa).

 

Les opérateurs d’un Corg doivent maîtriser l'emploi de la Base de données de sécurité publique (BDSP) et privilégier l’usage des moyens radio pour optimiser la réponse opérationnelle et la transmission des informations sur toute la circonscription.

© Sirpa gendarmerie - MAJ F. Balsamo

 

Évolution des outils

Dans l’esprit d’innovation de l’Institution, le module Sécurisation des interventions et demandes particulières de protection (SIDPP), communément appelé Sip, intégré à BDSP, a été mis en place. Il permet d’inscrire, pendant dix ans, les personnes ayant déjà fait l’objet d’une intervention de la gendarmerie pour des violences commises contre un gendarme ou un tiers civil. Dès lors, les patrouilles intervenant chez ces personnes sont avisées du risque particulier encouru.

En parallèle, les personnes exerçant une profession potentiellement menacée, à l’instar des magistrats, policiers, gendarmes, etc., peuvent s’inscrire pendant deux ans sur une autre version de Sip, permettant de les identifier en cas d’appel et d’y prêter une attention particulière.

Toutes ces inscriptions sont autorisées par la Cnil et suivies par la Section des systèmes des opérations et du renseignement (SSOr) basée à la DGGN.

Sur le plan opérationnel, une nouvelle version du module Ops, servant directement à gérer les interventions, sera déployée au second semestre 2018. « Outre une évolution de l’ergonomie et une meilleure fluidité dans son utilisation au quotidien, Ops V2 mettra automatiquement à jour les Fiches de prise en compte (FPC), renseignées à chaque acte réalisé lors d’une intervention. Le but étant d’optimiser l’utilisation de la cartographie. Cette dernière sera plus moderne et permettra de créer des situations tactiques plus enrichies », explique le capitaine Quentin Guichard, de la SSOr.

Autre innovation technologique : le système d’Affichage modulaire optimisé pour centre opérationnel (Amoco). Ce tableau numérique, en expérimentation dans le groupement de la Charente-Maritime, affiche, en temps réel, les patrouilles en service et la cartographie des véhicules géolocalisés. Ce mur informatique, mis à jour automatiquement, représentera un gain de temps précieux pour les opérateurs et facilitera la lecture des effectifs sur le terrain.

 

Parmi les innovations technologiques attendues, le système d'Affichage modulaire optimisé pour centre opérationnel (Amoco). Ce tableau numérique est en expérimentation dans le groupement de la Charente-Maritime.

© Corg GGD17

Une compétence territoriale élargie

Grâce à l’usage de la radio, les patrouilles disponibles aux abords d’un événement, y compris celles d’une compagnie ou d’un groupement limitrophe, sont instantanément avisées et peuvent, dans un souci d’efficacité et de sécurité, se proposer pour être engagées par le Corg.

Cette extra-territorialité peut s’étendre à l’interministériel ou à l’international pour les Corg frontaliers. Ainsi, le Corg 66 travaille régulièrement avec la Police aux frontières (Paf), les services des douanes, mais également avec les forces de l’ordre espagnoles et andorranes via le Centre de coopération policière et douanière (CCPD) qui sert d’interface. De ce fait, les compétences linguistiques des opérateurs servant dans ces unités frontalières sont fortement appréciées.

Dans cette même logique d’échanges, un Corg a pour partenaires quotidiens le Service départemental d’incendie et de secours (Sdis), le Samu, les polices nationale et municipale.

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